Lu par Catherine d'Auxi, Denis Arnoud.
Les derniers romans de Pascal Marmet trouvaient leur inspiration dans le monde des parfums. Avec "Le Roman du café", l'auteur change de thème. En abordant un breuvage que tout le monde ou presque boit mais que peu de gens connaissent bien, toutefois, il opère son virage avec succès. "Le Roman du café" reprend en effet la recette du "Roman du parfum": une intrigue simple et solide, menée sur un ton alerte et bouillonnant, qui sert de support à la présentation d'un produit connu. Enfin... connu, vraiment?
Il est vrai qu'ici, il ne sera guère question de jus de chaussette, si ce n'est par la bande. D'emblée, l'auteur conduit son lectorat auprès de quelques brûleries de café parisiennes qui offrent des grands crus de café - comme le ferait un bar à vins. C'est l'occasion d'évoquer quelques spécialités connues comme le Montagne bleue jamaïcain, mais aussi et surtout des choses plus rares, comme le Kopi Luwak, spécialité indonésienne. Chaque péripétie sert de prétexte à évoquer l'un ou l'autre aspect du café: cafetières, produits de base, méthodes de fabrication. Cela, sans parler des légendes...
... le café étant un produit dont l'origine se perd dans la nuit des temps, c'est un produit propice aux légendes, en effet. L'auteur excelle à faire rêver son lecteur, en évoquant les récits des temps héroïques, comme l'histoire du berger Kaldi, presque maître du monde, qui fit paître ses chèvres en un lieu où poussait le café... et découvrit ainsi ses propriétés de maintien de l'éveil.
Expédiant en Amérique du Sud les deux personnages qui conduisent l'intrigue, l'auteur offre un surcroît d'exotisme à ses lecteurs. Donnant à voir, de manière succincte, certains éléments liés à la spéculation et au commerce du café, il suggère que tout n'est pas rose dans les coulisses du petit noir. Quelques considérations sur le respect des producteurs et de la planète viennent compléter le tableau "économique" du produit, qui constitue un contrepoint bien factuel aux descriptions volontiers sensuelles du café que l'on consomme.
A noter aussi que l'auteur ne dédaigne pas a priori les capsules Nespresso; sa description "désincarnée" d'une telle boutique, porteuse de "l'idée du café", fait même partie des belles pages de ce roman - qui relève aussi une autre vérité: si Starbucks a un mérite, c'est d'avoir intéressé le grand public aux différents goûts qu'un café peut avoir. Reste que sa tendresse va aux petites brûleries parisiennes, qu'il visite avec ses personnages. Celle de Gloria Monténégro occupe le devant de la scène, mais d'autres sont citées; dommage que l'auteur n'en donne pas l'adresse.
C'est donc avec Johanna et Julien, un garçon non-voyant amis titulaire d'un "bac +18 en caféologie", que le lecteur est amené à faire le tour du sujet du café en 232 pages, annexes et poèmes de Gloria Monténégro compris. Le voyage s'avère bouillonnant, enthousiasmant, excitant - et tendre aussi parfois, comme doit l'être un bon café.
Pascal marmet, Le roman du café, Monaco, Editions du Rocher, 2014.
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