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27 décembre 2015 7 27 /12 /décembre /2015 20:16

Zola PoilsLu par Dup.

Le site de l'éditeur.

 

"Les poils mystérieux" est le sixième tome de la série parodique des "Aventures de Saint-Tin et son ami Lou", conçue par l'écrivain et éditeur Gordon Zola. C'est d'ailleurs bien lui qui signe ce roman, jusque dans ses moindres gags, tout en puisant quelques idées dans l'album "L'étoile mystérieuse" de Tintin. Celles-ci ont cependant été remises au goût du jour.

 

Ainsi, ce n'est plus une météorite qui génère de hautes températures sur Terre en début de récit, mais tout simplement le réchauffement climatique. L'auteur ose un lyrisme de pacotille, trop emphatique pour n'être pas parodique, afin de dramatiser une entrée en matière haletante, riche en points d'exclamation et de suspension. Déjà, les jeux de mots abondent, sans pour autant être envahissants: la lecture demeure fluide. Et le roman ne donnera guère d'explication sur ce réchauffement subit: son utilité n'excède pas celle d'un point de départ.

 

L'auteur sait ménager le contraste: ainsi, si le climat chauffe en début de roman, cette idée disparaît totalement dès lors que Saint-Tin et son équipe partent pour l'Arctique: le froid sera dès lors le lot des "Poils mystérieux", jusqu'au bout. Evidemment, cela donne lieu à des jeux de mots et à des gags en cascade.

 

Les références à l'album "L'Etoile mystérieuse" sont évidemment majoritaires, et l'action est assez largement traitée comme dans un livre de Tintin: il y a de l'aventure, un peu de bagarre, un animal de compagnie sentencieux et un Saint-Tin qui se montre presque abstinent. Si les références et allusions à l'ouvrage d'Hergé dominent et pourront faire sourire les tintinophiles (et elles se cachent partout, jusque dans l'onomastique, il faut être attentif ou astucieux pour ne rien manquer... Un petit regret? Les Fribourgeois n'y retrouveront pas Paul Cantonneau!), l'auteur ne manque pas de glisser des clins d'oeil à d'autres maîtres et monuments du gag, tels Franquin ("Gaffes, bévues et boulettes") ou "Les Tontons Flingueurs" ("éparpillés façon puzzle").

 

Enfin, l'auteur use d'une astuce classique, celle du McGuffin. Celle-ci fonctionne à fond dans "Les poils mystérieux": le lecteur est amené à tourner les pages vaille que vaille pour savoir, enfin, quelle est cette mystérieuse araignée qui terrifie les explorateurs polaires et fait avancer le professeur Margarine.

 

Quelques aspects éditoriaux, enfin: ce livre a deux titres, ce qui ne gâche rien: l'auteur assume pleinement le fait qu'au dos de ce roman, il est écrit "Les toiles mystérieuses", un titre tout aussi pertinent que l'autre. Et pour les collectionneurs, il existe une version à la couverture noire, censurée.

 

En définitive, le lecteur profite d'un ouvrage accrocheur et rigolo, court qui plus est. Autant de raisons pour dire qu'il constitue une pause sourire idéale entre deux lectures plus graves...

 

Gordon Zola, Les poils mystérieux, Paris, Le Léopard Masqué, 2009.

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20 août 2014 3 20 /08 /août /2014 20:22

hebergeur imageLu par Audrey, Dorothée, La Walkyrie, Mélusine.

Défi Polars et thrillers

Le site de l'éditeur

 

"Historico-déconnant": le nom de la collection où a paru "Le père Denoël est-il une ordure?" est on ne peut plus pertinent. L'auteur de ce roman humoristique, Gordon Zola, revisite à sa manière - celle du "poilar", le polar poilant - l'un des mystères de l'histoire de l'édition parisienne: la mort par balle de Robert Denoël, connu pour avoir été le premier éditeur de Louis-Ferdinand Céline. Force est que de retrouver ce personnage dans un contexte burlesque après l'avoir croisé dans le grave "Sigmaringen" de Pierre Assouline, ça fait quelque chose...

 

Le rire et le sérieux

Alors certes, les deux auteurs explorent une période similaire, celle de la Seconde guerre mondiale, "Le père Denoël est-il une ordure?" trouvant son contexte juste après celui de "Sigmaringen". Chacun dans leur domaine, les auteurs de ces deux romans s'avèrent virtuoses, excellents même.

 

hebergeur image

Gordon Zola fait rire, certes, et là, il est dans son rôle; mais son ouvrage s'appuie sur une documentation sérieuse, l'auteur étant allé au bout de ce qu'il pouvait trouver dans des archives parfois interdites d'accès. Certains documents sont reproduits. Sont-ils vrais ou inventés? En parcourant ces coupures de presse, on pense volontiers à certaines pages de la série "Eraste Fandorine" de Boris Akounine. Dès lors, l'humour sert de support à la réflexion: "Quand ce qui prête à rire donne à penser", lit-on en page de garde. Sage avertissement.

 

Suivez le cheveu...

Pour un polar poilant, quoi de plus évident que d'écrire quelques pages sur les femmes collaboratrices tondues à la fin de la Seconde guerre mondiale, dans le cadre d'une justice expéditive? L'auteur admet le côté détestable d'une telle manière de procéder, relevant de façon claire que les résistants de la dernière heure ont été les plus ardents tondeurs.

 

Mais c'est quand même le cheveu qui constitue, si j'ose dire, le fil rouge de l'humour de ce roman. Cela commence de façon hénaurme avec la création d'une permanence téléphonique nommée "SOS femmes tondues", dont l'ambiance rappelle immanquablement un film fameux avec Anémone et Thierry Lhermitte. De manière plus fine, l'auteur exploite à fond les manettes le champ lexical du cheveu, de bout en bout du roman, quitte à oser l'à-peu-près afin de déborder un peu. Il y a même un coiffeur qui traîne par là - et qui raconte des histoires à la Montaigne.

 

Jeux de mots avant tout

C'est que le jeu de mots, éventuellement tiré par les cheveux, domine dans "Le père Denoël est-il une ordure?". Il se décline en logorrhées savoureuses qui s'étendent sur de longs paragraphes - le lecteur est servi, à tel point qu'il lui faudra peut-être relire plusieurs fois lesdits paragraphes, éventuellement à haute voix, afin d'en savourer à la fois le poivre et le sel.

 

Les jeux de mots concernent aussi les noms des personnages inventés, ce qui permet de les distinguer des personnages réels - même si ceux-ci, à leur tour, voient leurs patronymes déformés ou utilisés pour d'autres blagues. A ce titre, Gaston Gallimard en prend pour son grade, par l'entremise d'un personnage secondaire percutant nommé Hubert Guth. Enfin, les contrepèteries sont fort présentes; on en vient à les soupçonner un peu partout. Ainsi naît une musique à la San-Antonio, une poésie rythmée par le verbe que l'auteur tord jusqu'au bout en vue de faire rire, avec succès.

 

Rien d'une plaisanterie... quoique!

Telle qu'elle est construite, l'intrigue est finalement assez simple. L'auteur use commodément d'un policier pas très futé, Ducourthial, pour donner une marge de manoeuvre à son personnage principal, un avocat parisien bien versé dans la casuistique nommé Lucien Bonplaisir (tout un programme!). Elle laisse aussi toute la place disponible à un humour verbal désopilant, graveleux à l'occasion (ah, l'esprit gaulois!), que le lecteur attentif saura débusquer dans les moindres recoins.

 

Cela, sur une idée de départ qui n'a rien d'une plaisanterie: après tout, c'est de la mort violente d'un éditeur qu'il s'agit. L'auteur de "Le père Denoël est-il une ordure?" apporte ainsi sa contribution, imaginaire mais construite et jamais rasoir, à une affaire qui n'a jamais été vraiment élucidée et qui, apparemment, touche quelques personnalités importantes du monde politique de l'immédiat après-guerre. A lire, à rire, à réfléchir, voudrait-on dire. Et - oui - on peut, en se disant que le roman n'est qu'une manière parmi d'autres de montrer le réel, surtout s'il s'obstine à se cacher.

 

Gordon Zola, Le père Denoël est-il une ordure?, Paris, Le Léopard démasqué, 2013.

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