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7 décembre 2013 6 07 /12 /décembre /2013 22:43

hebergeur imageLu dans le cadre des défis Premier roman et Thriller.

Lu par Aniouchka, Anita (en norvégien), Carnet de lecture, Emeralda, Hervé, Dasola, Le Merydien, Ma petite bibliothèque, Marie, Miloupio, Moon, Un art quotidien.

 

Si je vous dis Norvège, vous penserez sans doute au drame d'Utøya et, plus proche de nous, au saumon tout pourri. Mais cela ne saurait faire oublier que le pays des fjords recèle d'excellents auteurs de polars, tels Jo Nesbø - dont j'avais évoqué en son temps le très bon opus "Chasseur de têtes". Dans le même genre littéraire, force est de reconnaître que Jørgen Brekke ne se défend pas mal, en ajoutant au thriller ordinaire une couche d'érudition historique.

 

Un début épuisant...

Tout commence pourtant d'une manière assez détestable pour le lecteur: ça décolle lentement, longuement, avec des allers et retours incessants entre des choses fort distantes: les Etats-Unis et la Norvège d'aujourd'hui, et l'Europe des humanistes de la Renaissance. A cela s'ajoutent des personnages aux noms scandinaves, donc peu coutumiers, mêlés à des noms anglo-saxons assez passe-partout.

 

Et puis, il y a la mise en place d'un arrière-plan érudit qui, s'il est indéniablement costaud et fait, de façon équilibrée, la part de la fiction et du réel (cf. l'épilogue), pourra paraître pesant pour un lecteur pressé d'en venir aux faits, vite lassé d'être baladé entre les mystères d'Edgar Allan Poe et ceux de Lysholm Kudtzon et la réfutation des théories de Galien sur l'anatomie humaine par les anatomistes, barbiers et chirurgiens de la Renaissance.

 

Cela dit, de manière classique et efficace, l'auteur choisit de lancer son roman par une scène violente de meurtre d'enfant en famille, agrémenté de quelques gadgets scandinaves: les meubles Ikea et les Lego, certes mondialement connus et appréciés, évoquent pour tout un chacun le nord de l'Europe. A ce stade, le tropisme norvégien importe peu...

 

... et puis tout décolle!

Et puis soudain, un peu avant la moitié de ce roman (qui compte quand même 480 pages), tout décolle. C'est peut-être dû à une évolution progressive du rythme: l'auteur renonce peu à peu aux allers et retours temporels et spatiaux pour concentrer son récit à Trondheim, source de l'intrigue.

 

Le lecteur est amené à voir évoluer un tueur qui a la détestable habitude d'écorcher ses victimes, en se conformant au "Livre de Johannes", un ouvrage mystérieux de la Renaissance: est-ce un traité médical ou les mémoires du pire serial killer que la Norvège ait couvé en son sein? L'auteur suggère par ailleurs une malédiction autour de cet ouvrage, écrit sur du parchemin, dont la reliure est en peau humaine.

 

Les personnages se révèlent soudain complexes, ce qui permet, tout en douceur, des retournements de situation adroits. Ainsi, comme souvent dans les polars, le principal suspect n'est pas le vrai coupable, même s'il a déjà été inquiété auparavant. L'auteur a l'intelligence de montrer sans juger, dans son récit, les erreurs de la police qu'il met en scène: loin d'être toute-puissante, elle n'arrive pas à éviter une mort qui aurait pu l'être avec un peu plus de perspicacité. Et puis, il y a un bonhomme qui fait une intolérance à l'alcool (il est fin schlass après un verre de vin), une policière victime d'un viol dans sa jeunesse, un mystérieux moine, etc. Cela, sans oublier un tueur qui écorche ses victimes.

 

Un soupçon d'interculturalité

Dans le même esprit, peut-être typiquement norvégien, le lecteur appréciera d'être confronté à des policiers hommes et femmes, présentés de façon toute naturelle comme tels, sans psychodrames relatifs à la difficulté d'être une femme au sein d'un organe de police. Une forme d'égalité! Le lecteur sera par ailleurs surpris de découvrir que les policiers norvégiens ne sont pas armés; la présence d'une agente américaine permet d'ailleurs de mettre au jour, par contraste, quelques particularités culturelles et policières.

 

Les lecteurs qui aiment les thrillers et polars au solide arrière-plan historique se sentiront donc à l'aise dans ce roman, assez vite; les autres risquent de ramer au début, voire de laisser tomber, d'autant plus que la traduction, certes globalement efficace, n'est pas toujours rédigée dans un français de la meilleure eau. Ils passeront à côté d'une intrigue bien construite, servie par un univers romanesque complexe et raffiné à souhait, mais qui tarde un peu à démarrer - c'est là son principal défaut... vous êtes prévenus!

 

Jørgen Brekke, Le Livre de Johannes, Paris, Balland, 2012, traduction du norvégien par Carine Bruy.

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