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31 octobre 2014 5 31 /10 /octobre /2014 21:30

partage photo gratuitLu par Goliath, La Noiraude.
Défi
Rentrée littéraire 2014.

Le site de l'éditeur, que je remercie cordialement pour l'envoi.

 

Le cinéma, un sujet littéraire porteur? D'autres s'y sont essayés, avec un certain bonheur, à l'instar de Jean-Pierre Richard avec son fort beau recueil de nouvelles "La vieille dame qui avait trop dansé", qui fait fort bien le tour du sujet et de ses éléments les plus insoupçonnables. Certes, le cinéma est un fil rouge du recueil de nouvelles "Les vrais héros ne portent pas de slip rouge" d'Alex Sénéquier, mais il joue la carte de la prise de distance intelligente avec son sujet. Et il a un point commun avec le recueil de Jean-Pierre Richard: l'originalité des points de vue.

 

Certes, ceux-ci ne sont pas tous liés au cinéma, au sens le plus strict. Il sera question de théâtre ("La patience des tournesols"), de la seconde vie du membre d'un boy's band ("Me 4 You"), voire d'oeuvres d'art héritées ("La Biche"). A chaque fois, l'auteur offre un regard original, confirmé par des chutes impeccables. Cela, sans oublier la nouvelle éponyme: "Les vrais héros ne portent pas de slip rouge" relate l'ambiance qui peut régner dans une usine qui pourrait fermer. Il n'y est guère question de slip rouge, et si le personnage mis en scène est un héros des usines, ouvrier exemplaire, il n'a rien d'un Superman. Certes, la nouvelle, écrite dans une langue fluide, fonctionne à la perfection; mais on pourrait gloser, au moins un peu, sur la pertinence de son titre!

 

Côté cinéma, c'est dès le début du recueil que l'auteur démystifie la notion de héros, dans une nouvelle à chute et à suspens savoureuse qui fait la part belle aux acteurs de cinéma de sexe masculin pourvus de gros bras - Chuck Norris doit être présent, de même qu'un certain Sylvester Stallone ou quelques autres. Mis en scène dans une salle obscure, tout le récit se présente comme un hommage à ces acteurs de cinéma populaires; mais la chute éclaire brusquement tout le reste d'une manière inattendue et rappelle, avec La Rochefoucauld, qu'il n'y a pas de bonté gratuite.

 

Le cinéma peut être un élément du réel, et la confusion du réel et de ce qui se passe sur la toile est très bien peinte dans "Le rôle d'une vie". Un lecteur distrait verra ici, sans peine, l'histoire d'un looser et de sa copine qui a eu le tort de croire en lui. Dans le contexte cinématographique que l'auteur installe, ledit looser est porté au statut de type littéraire: l'auteur a créé un personnage qui, au sens le plus littéral, "se fait un film". Cela se concrétise par la teneur des Mémoires que le narrateur se propose de rédiger, autant que par les rêves de carrière. Le monde du cinéma est celui des illusions; dès le côté tragique de la fin s'avère inéluctable. Et si le personnage principal masculin de la nouvelle "Le rôle d'une vie" fait figure d'homme immature piégé par ses illusions de carrière et finalement largué par une copine plus pragmatique que lui, celui-ci fait écho à William, prêt à tourner la page d'une jeunesse consacrée au boy's band, ce qui fait de lui un jeune homme mûr, capable de faire face au changement - et de retenir ses conquêtes féminines.

 

Certaines nouvelles du recueil "Les vrais héros ne portent pas de slip rouge" sont loin de la question du cinéma. Elles interrogent le lecteur sur ce qu'est la société où il vit, de manière classique. On se retrouve donc avec une psychanalyse ratée parce que réussie ("Fin de thérapie"), ou à face à une nouvelle qui interpelle au sujet des vertus d'une bonne fessée: celle-ci peut-elle résoudre un conflit social? La mise en perspective d'une méthode corrective éminemment privée et d'un mode d'action typiquement public (le conflit social) suggère que l'auteur sait faire le grand écart quand il le faut.

 

Les nouvelles du recueil "Les vrais héros ne portent pas de slip rouge" ne se distinguent pas par un style frappant dès les premières lignes. Moderne sans prendre la tête, la manière d'écrire de l'auteur se caractérise cependant par une vivacité et une fluidité indéniables, parfaitement dans le ton de ce qui est raconté page après page. Elle est irriguée par la culture cinématographique de l'auteur, qui offre à chacun le plaisir de retrouver les références, qu'elles proviennent ou non du cinéma.

 

Axel Sénéquier, Les vrais héros ne portent pas de slip rouge, Louvain-la-Neuve, Quatrature, 2014.

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commentaires

A
Un titre drôle !
D
Ah oui - les nouvelles sont cependant plus sages.
S
Je ne suis pas fan de nouvelles, et ce que tu en dis ici ne me tente pas plus...
D
C'est un joli recueil, soigné, de belle qualité, dans un style classique bien que vivace...

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