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1 avril 2015 3 01 /04 /avril /2015 22:49

Rondeau EcrisLu par Goliath, Nadège, Phil, Venise.

Le site de l'auteur.

 

"J'écris parce que je chante mal": le titre de ce recueil de nouvelles a de quoi intriguer. Signé de la plume de Daniel Rondeau, il a connu une première vie au Québec avant d'être édité aux excellentes éditions Quadrature, spécialisées dans la nouvelle. Cette maison d'édition a eu la main heureuse: avec cet ouvrage, elle offre au lectorat européen la possibilité de découvrir un très bel auteur montréalais, capable d'une belle inventivité.

 

Les nouvelles sont courtes, disons-le, et le lecteur les engloutit rapidement. Les pages se tournent toutes seules, et les situations, volontiers tirées d'un ordinaire des plus quotidiens, se succèdent vite. Il y a quelques éléments récurrents, cependant, par exemple les rendez-vous manqués et les rencontres dans les bars - éventuellement marquées par un brin de philosophie de bistrot.

 

Dès les premières lignes, l'écriture s'avère allusive et séduisante, et l'éditeur a bien fait de citer, en quatrième de couverture, l'incipit de "J'écris parce que je chante mal": "... Rien ne pressait pourtant, mais la moto semblait avoir trouvé l'hiver très long." On trouvera plusieurs images de ce genre, subtiles, astucieuses et souriantes, tout au long de ce recueil. L'avant-dernière partie en particulier, "Pourquoi y a-t-il un verbe qui signifie "dire un mensonge" mais aucun pour "dire la vérité"?", recèle quelques textes pleins d'esprit qui vont prêter à sourire. Sous la plume de l'auteur, la mort elle-même a quelque chose d'astucieusement plaisant, par exemple dans "Duel sur l'autoroute" et "Entre les deux phares", qui se font écho d'un bout à l'autre du recueil - ce n'est sans doute pas un hasard.

 

Il convient de relever aussi, plus largement, le goût de l'auteur pour la réflexion sur la langue française. On s'amusera par exemple des clic-clic de "Clairs-obscurs" (une ambiance à la Courteline revisitée à la manière moderne, avec une chute prévisible mais bien amenée et soigneusement construite mine de rien). On sourira aussi aux jeux sur les temps des verbes dans "Ces temps qui parlent". Et puis, à plus d'une reprise, les accents chantent dans la bouche des personnes. Tout cela, enfin, va jusqu'à une nouvelle aux allures de "making of", "Delete", qui dépeint de manière extrêmement économique la rédaction d'un message de rupture expéditif. Bel exemple d'un texte qui va à l'essentiel!

 

Les nouvelles ont donc volontiers une chute, délicate, à la mesure de textes tendres ou incisifs, toujours bien troussés. Elles mettent en scène des images du quotidien dans lesquelles, sans doute, un tout un chacun pourra se reconnaître. L'auteur assume par ailleurs ses origines québécoises, et les québécismes qu'il égrène se savourent à l'envi: ils arrivent naturellement et viennent enrichir des textes d'une drôlerie délicate ou franche, toujours poétiques et pleins d'une virtuose brièveté: si l'auteur écrit bien, c'est qu'il sait faire chanter ses phrases et ses idées.

 

Daniel H. Rondeau, J'écris parce que je chante mal, Louvain-la-Neuve, Quadrature, 2015.

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commentaires

A
Un beau recueil qui m'a plu aussi. Une langue fine où il joue magistralement avec les mots.
D
... tout en finesse; mais mine de rien, le sens de l'image est fort!
A
Et les télé-crochets pour les auteurs, ça existe aussi ?
D
Il y a eu quelque chose dans ce genre il y a quelques mois en arrière: ça s'appelait l'Académie Balzac.

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