Défi Premier roman.
Une jeune femme qui aime un prêtre: quel départ d'intrigue prometteur pour un premier roman! C'est celui de "Jeanne", premier roman de Véronique Timmermans, dernièrement paru aux éditions Plaisir de lire. Le propos couvre deux générations: l'auteure place en regard le vécu de la mère, Jeanne, rédigé en italique, et celui de la fille, et celui de Catherine. Et prend soin de les faire communiquer.
Le temps de Jeanne, c'est celui de l'immédiat après-guerre, où l'on vit modestement. C'est aussi le temps des familles où un paterfamilias tyrannique règne sans partage. C'est aussi celui des sentiments interdits par la société, sous peine d'opprobre. Quitte à ce que l'écriture paraisse un peu terne parfois, la romancière choisit de ne pas en rajouter dans le registre sulfureux, tentant dès lors qu'on raconte des amours interdites avec un prêtre catholique. Elle préfère peindre avec délicatesse les moments d'ambiances lourdes en famille, évoquer ces choix impossibles qu'on fait cependant avec la sûreté de soi que l'on peut avoir à vingt ans. Au fil des pages, se noue un destin en demi-teinte, qui a son lot de difficultés.
C'est tout naturellement que le point de vue de Catherine, la fille, entre en résonance avec celui de Jeanne. Femme d'aujourd'hui, Catherine mène une quête, celle de ses origines. Là aussi, elle se heurte au silence de sa mère, une artiste devenue âgée, dont les absences sont de plus en plus nombreuses. L'auteure sait disséminer de nombreux indices sur le chemin de Catherine: un journal, des lettres, des gens qui ont côtoyé Jeanne dans sa jeunesse. La bonne idée a été de mettre en scène le moment où l'on vide la maison de l'oncle maternel de Catherine, récemment décédé. Moment propice aux déballages: ceux des objets font écho à ceux des secrets.
Pour son entrée en littérature, Véronique Timmermans revisite à sa manière le thème porteur des secrets de famille. Elle offre un roman sage, pétri d'ambiances plutôt que d'éclats. Il s'achève d'une manière ouverte qui laisse l'impression que pour Catherine, quelque chose peut commencer après la dernière phrase.
Véronique Timmermans, Jeanne, Lausanne, Plaisir de lire, 2016.
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