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23 avril 2015 4 23 /04 /avril /2015 20:55

hebergement d'imageChacun a une chanson qu'il préfère, qu'il est même prêt à défendre les armes à la main s'il le faut: "Et il y a plusieurs chansons sur lesquelles il ne faut pas venir nous chercher...", résument les préfaciers. Partant de cette idée, le journaliste Eric Bulliard et l'écrivain Michaël Perruchoud ont eu, autour d'une bonne bière, l'idée d'inviter tout un chacun à défendre sa chanson en quelques phrases, sous la forme de billets de blog. Ainsi est né un blog, à l'enseigne de "Je ne laisserai jamais dire que ce n'est pas la plus belle chanson du monde". Face au succès, les instigateurs de ce projet ont décidé de faire un livre qui recueille certains de ces hymnes à des chansons. Collectif et portant le même titre que le blog, le bouquin vient de paraître aux éditions Cousu Mouche - que je remercie pour l'envoi.

 

Léo Ferré en couverture: c'est déjà tout un programme. Et l'intérieur ne le trahit pas: le plus souvent, les intervenants évoquent des interprètes qu'on connaît en général par le disque, souvent d'une production "mainstream" qui se positionne comme (faussement) indépendante et s'adresse à un public intello. Les chouchous? Ce sont Hubert-Félix Thiéfaine, Jacques Brel, Georges Brassens. Certains intervenants évoquent leurs coups de coeur de la chanson anglophone. Enfin, un ou deux francs-tireurs, trop rares, osent sortir des chansons attendues pour évoquer le traditionnel "A la claire fontaine", ou "Pandi-Panda" de Chantal Goya. Sur le blog, il y a même un témoignage autour d'un chant de Taizé...

 

Le lecteur note rapidement deux tendances dans ces textes. Il y a d'une part les textes qui expliquent pourquoi telle chanson est la plus belle du monde. C'est l'occasion de croiser des auteurs mélomanes attentifs à ce qu'ils écoutent, et capables de mettre en mots des émotions exactes et, parfois, des aspects techniques. Même si la plume sait se montrer alerte, l'exercice trouve ici une limite: le lecteur est invité à écouter ces mélomanes crier au génie de façon un peu abstraite, convaincue à défaut d'être convaincante - surtout s'il ne connaît pas la chanson dont il est question.

 

Il y a de quoi vibrer bien davantage lorsque l'auteur choisit une chanson rattachée à un vécu intime, éventuellement puisé dans sa jeunesse. La présence de "Pandi-Panda" dans un tel recueil, par exemple, pourra paraître incongrue; mais n'importe quel parent vibrera à la lecture de cette histoire, racontée avec esprit, d'un enfant qu'on endort enfin avec cette chanson, après avoir tout essayé. Enfin, les auteurs parviennent le plus souvent à développer, en quelques phrases, une véritable poésie qui permet à l'exercice d'éviter l'écueil ultime: ressembler à une dissertation scolaire.

 

Si chaque auteur a bien sa chanson préférée, plus d'un détourne la contrainte de l'exercice en en évoquant d'autres, comme par effraction. Le témoignage sur "Syracuse" de Henri Salvador est à ce titre extraordinaire: abreuvé de côtes-du-Rhône ("je ne laisserai jamais dire que ce n'est pas le plus beau vin du monde"), l'auteur évoque toute une galerie de chansons qui auraient pu prétendre au titre... celles-ci vont résonner dans la tête du lecteur, et créer un sacré juke-box dans sa tête. Certains auteurs glissent discrètement des citations de chansons dans leurs textes. Une manière de donner une présence de l'ombre à ces musiciens qu'on n'a pas pu retenir.

 

L'exercice joue parfois la mauvaise foi calculée ("Je ne parle même pas de ceux qui écoutaient Foreigner ou A-ha. À l'époque déjà, je ne leur parlais pas", lâche un auteur) qui, espérons-le, tient davantage de la posture théâtrale que de la conviction intime. Il est certain, par ailleurs, que l'une ou l'autre prise de position pourra faire débat, passionnément. Faut-il s'en plaindre? Nenni: toute plaidoirie a ses outrances, et le deuxième degré est admis, voire encouragé: après tout, c'est ce qu'on aime dans ce genre d'exercice!

 

Le lecteur attentif au monde des lettres et de la musique romands reconnaîtra les noms des auteurs du recueil. Sans doute connaîtra-t-il quelqu'un: on y retrouve l'écurie des écrivains de Cousu Mouche en force, mais aussi quelques journalistes romands, des musiciens et même des illustrateurs, qui ont osé créer des images franches et directes à partir d'une chanson. Le livre "Je ne laisserai jamais dire que ce n'est pas la plus belle chanson du monde..." reprend des billets de blog - et comme le blog est toujours ouvert, chacune et chacun d'entre vous est invité à participer à votre tour, peut-être en élargissant le terrain de jeu. Les initiateurs du projet laissent du reste entendre qu'il y aura d'autres publications du même genre.

 

Il faudra que je m'y mette...

 

Collectif, Je ne laisserai jamais dire que ce n'est pas la plus belle chanson du monde..., Genève, Cousu Mouche, 2015. Préface d'Eric Bulliard, Michaël Perruchoud et Sébastien G. Couture.

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commentaires

A
Reste à savoir quelle sera pour toi la plus belle chanson et quels seront tes arguments.....
D
En effet! Franchement, j'hésite...

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