Défis Premier roman et Thrillers et polars.
Une fillasse de trente ans, "la Petite", qu'on retrouve morte au pied des ruines historiques d'un site médiéval près de Marmande. Le suspect présumé et quasi désigné, "L'Emile", claque aussi. En plus, quelques histoires familiales pour faire bon poids. Généreuse compoisition que celle du polar "Le Maistre des Ruines", premier roman de l'écrivain Dominique Bousquet.
Généreux, en effet... L'auteur se plaît à relater de longues histoires qui ont trait au passé des personnages. Ces histoires sont le signe d'une inventivité certaine, et exploitent dans un souci consommé du détail le passé de certains personnages, remontant parfois les générations. Elles s'étendent en longs paragraphes, ce qui nuit au rythme de l'histoire, en dépit d'une écriture fluide et parfois ironique: l'auteur aurait gagné beaucoup à dramatiser ces récits, au moyen de dialogues, de rythmes, ou en étant plus proche des personnages décrits. C'est que chacune de ces histoires familiales, couple stérile qui adopte dans des conditions opaques ou passé trouble du policier qui mène l'enquête, aurait mérité un roman!
Ces longs paragraphes s'inscrivent en contrepoint avec des dialogues souvent rapides, parfois marqués par des traits d'esprit qui dénotent une complicité entre les personnages. Ces dialogues ont le goût de respirations bienvenues, voire attendues - même si l'alternance entre dialogues rapides et longs paragraphes installe un rythme binaire qui finit par devenir monotone.
L'auteur installe sans tarder le contexte de son récit. Le premier chapitre met en présence "La Petite" et "L'Emile", personnages clés du roman. L'Emile, dit "Le Bourru", a droit à un portrait pas piqué des vers, et l'on sent que l'auteur s'amuse à caricaturer une figure de misanthrope invétéré. Les autres personnages se révèlent peu à peu. Le policier Karnaukhov, quant à lui, a une belle épaisseur: l'auteur joue avec ses origines russes et son physique hors norme d'ancien rugbyman et d'ancienne petite (enfin, pas tant que ça) frappe: voitures trop petites, portes étroites...
Quelques maladresses de plume, enfin, laissent au lecteur l'impression d'un ouvrage brut de décoffrage, qui aurait mérité un dernier coup de lime, une dernière séance de travail qui aurait été l'occasion de nourrir encore le mystère médiéval des ruines où tout se trame. Reste que l'auteur a ses qualités, en particulier une inventivité qui ne manque jamais de surprendre, et une manière bien à lui de rendre ses personnages attachants et proches en explorant leur passé. Le personnage de Vladimir Karnaukhov est d'ailleurs riche, suffisamment pour que l'auteur lui consacre un deuxième roman, "Vulnérables" (à découvrir ici).
Dominique Bousquet, Le Maistre des ruines, Broc, La Plume Noire, 2008.
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