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20 juillet 2010 2 20 /07 /juillet /2010 19:42

L'ami Calepin l'avait évoqué en son temps, le placo de Férocias l'aurait apprécié pour des questions de poids... et Wrath revient à la charge ce matin en citant Frédéric Beigbeder: faut-il adopter l'e-book? L'auteur controversé de "99 francs" est contre... et rebaptise du beau nom de "livre Gutenberg" la version papier. Son argument principal contre le livre électronique? L'absence de cérémonial qu'implique ce dernier.

 

C'est un argument original en faveur du livre Gutenberg. On l'ajoutera aux arguments affectifs maintes fois évoqués par de multiples (e-)lecteurs dès que le débat émerge: l'odeur du papier, le contact avec les feuilles, la farfouille en librairie, la gestion de piles à lire manhattanéennes, le creux léger qu'une impression traditionnelle au plomb peut faire dans le papier d'un livre datant d'avant l'invention de la composition informatisée. Tout cela, nous l'adorons, même lorsque notre bibliothèque ou notre PAL nous tombe dessus en traître - Férocias et Charles-Valentin Alkan, compositeur français mort accidentellement sous ses livres alors qu'il empoignait son Talmud, en savent quelque chose.

 

A ces derniers aspects physiques relatifs à l'encombrement, d'aucuns rétorqueront que les liseuses de livres électroniques permettent de tout avoir dans un seul contenant, plus gros qu'un roman d'Amélie Nothomb - et encore, dans les petites années. Les commerçants suggéreront même que c'est un réel bonheur de pouvoir farfouiller dans sa bibliothèque ou dans sa pile à lire depuis n'importe où, puisqu'on peut les emporter partout avec soi. Votre PAL dans le train: chic, en effet! Et pour ce luxe d'un genre nouveau, l'odeur de l'informatique neuve remplacera aisément celle du vieux papier tout champignonneux...

 

Mais quelques soucis d'ordre pragmatique devraient donner à réfléchir à ceux qui se tâtent. A-t-on pensé qu'un si petit contenant se perd facilement? Vous me direz qu'un livre, ça se perd aussi; mais une bibliothèque papier entière, là, il faut le faire. Les livres sur papier peuvent prendre feu, souffrir de dégâts des eaux... OK; mais ces problèmes peuvent aussi survenir pour une liseuse. Et là, c'est toute une bibliothèque qui peut se perdre. Sauvegarde de sécurité, me répondrez-vous. Oui, mais avec les livres sur papier, ce n'est pas nécessaire...

 

Côté technique, on devine sans peine qu'un livre Gutenberg vivra plus longtemps qu'une liseuse (dès lors, faut-il régulièrement transvaser sa bibliothèque d'un appareil ancien à un appareil de la nouvelle génération?), sans parler d'un être humain (le livre ci-dessus date du dix-neuvième siècle, époque des débuts de la littérature luxembourgeoise). Il y a aussi les aspects de confort de la lecture: à mon avis (mais peut-être que je retarde), le lecteur sur liseuse est toujours à la merci d'un plantage, d'un "freeze", voire d'une batterie à plat. Rageant quand ça arrive au moment fatidique où Ambre, qui est belle mais ne le sait pas encore avec ses yeux verts comme le fond d'une piscine, va déclarer sa flamme à Jack, le beau bûcheron musclé au coeur aussi tendre qu'un fondant au chocolat...

 

... et cet interlude harlequinien me permet de faire une transition douce vers le choix disponible sur liseuse, si possible dans le format de la vôtre. Certes, les classiques célèbres sont largement repris et disponibles à prix doux. Qu'en est-il de la littérature actuelle? Les grands éditeurs s'y sont peut-être mis; la situation doit être plus nuancée chez les moyens et les petits, qui ne sont pas forcément les moins intéressants comme on le sait. Enfin, qu'en est-il des ouvrages anciens tombés dans l'oubli, parfois injustement? Et la poésie?

 

Ah - et le dernier argument, un argument que Nicolas Sarkozy ne reniera certainement pas: une photo présidentielle avec un e-book en arrière plan, ça en jette quand même moins que si cet arrière-plan est constitué de beaux livres... il paraît même que certaines personnes achètent des livres au mètre, genre Pléiade, rien que pour la décoration d'un cabinet. Cela, sans parler des magasins de meubles, qui exposent parfois de vrais livres dans les rayons des étagères qu'ils exposent. Sans même être un objet de lecture, le livre Gutenberg en tant qu'objet décoratif, symbole de culture, n'est pas près d'être détrôné.

 

Et vous, plutôt papier ou électronique? Moi, j'ai choisi...

 

Illustrations: http://www.linternaute.com; http://www.luxembourg.public.lu/fr/culture/litterature/index.html

 

Tel était le cinq centième billet de ce blog. Pour marquer le coup, ça valait la peine d'être un peu plus technologique que d'habitude...

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15 juillet 2010 4 15 /07 /juillet /2010 21:29

341744057.jpgRappelez-vous: l'été dernier, Chiffonnette et HappyFew nous avaient fait vibrer aux rythmes chaloupés des histoires concoctées par Harlequin au travers du défi "Harlequinades", qui rimait souvent avec "poilades". Ecrireune quatrième de couverture après avoir lu un (ou plusieurs) titres de la série, telle était la gageure.

 

Et parce que l'été 2010 promet d'être au moins aussi chaud et ensoleillé que son illustre prédécesseur, le défi reprend à l'enseigne des Harlequinades 2010! L'exercice va se corser un peu: certes, il convient toujours de lire un des ouvrages publiés par Harlequin dans l'une de ses multiples collections (je me concentrerai sur "Télémania" de Sarah Mlynowski, paru dans la collection "Red Dress Ink", et me réserve le droit de taper dans la sulfureuse collection "Spicy" si j'ai un peu de temps). Mais l'exercice de rédaction va se corser cette année, puisqu'il s'agira carrément de rédiger un chapitre de Harlequin.

 

Le tout sera, comme l'an dernier, soumis à un jury impartial et incorruptible... A la clé, huit Harlequins a gagner!

 

J'en suis, et vous!?

 

P. S.: les logos sont d'Ofelia. Chicos!

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26 juin 2010 6 26 /06 /juin /2010 17:31

PhotobucketDeux actualités:

 

D'une part, L'Ogresse vient de publier un billet sur "Messieurs les hommes" de San-Antonio, dans le cadre du désormais rituel défi de l'année. Il s'agit d'un opus de 1955 - bonne époque donc!

 

D'autre part, une lecture commune autour de Nick Hornby a été lancée chez Pickwick. Il n'est pas exclu que j'y participe, peut-être avec un peu d'avance puisque je suis justement en train de découvrir cet auteur avec "Juliet, Naked", son dernier opus, qui vient de paraître. Affaire à suivre!

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6 mai 2010 4 06 /05 /mai /2010 21:23

Photobucket... Martine l'a fait! Dans le genre "Objectif PAL" (un défi signé Antigone), je lui tire mon chapeau - même si je ne participe pas au défi du même nom.  

J'ai bricolé ce petit truc il y a quelque temps, mais le système est en panne ce soir. Peut-être aurez-vous plus de chance? Le Martine Cover Generator a refait surface
ici, Si ça marche chez vous, amusez-vous bien! Et si vous avez d'autres sources fiables (sites web, etc.) pour cette application plutôt cocasse, faites-moi signe.

Enfin, si cela vous amuse, je me réjouis de découvrir vos créations... mais surtout, je vous souhaite de bonnes lectures! Quant à moi, je retourne aux miennes illico.

 

 

 

 

 

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21 janvier 2010 4 21 /01 /janvier /2010 22:04

Mort il y a longtemps (photo), Edgar Allan Poe risque à présent de mourir une seconde fois, de soif: pour la première fois depuis 1949, il n'y a pas eu de cognac sur sa tombe cette année. Chaque année depuis longtemps, en effet, un mystérieux inconnu, surnommé "Poe Toaster" venait fleurir la tombe de l'écrivain... et agrémentait son hommage (trois roses, symbolisant l'épouse de l'auteur, sa belle-soeur et lui-même) d'une bonne bouteille de bon cognac.

C'est là que l'affaire commence à ressembler à histoire extraordinaire que l'écrivain n'aurait pas reniée. Qui, en effet, est l'auteur de ces hommages annuels? Le conservateur de la maison-musée Edgar Allan Poe se perd en conjectures; il se souvient d'avoir épié le mystérieux donateur, et d'avoir même repéré qu'il portait un chapeau et une écharpe blanche. Le nom d'un certain David Franks, poète amateur de canulars, circule - d'autant plus que, mort la semaine dernière, il n'aurait pas pu assumer son pensum annuel.  

Problème: outre des fleurs et du cognac, le défunt écrivain recevait des billets doux laissant entendre que la tradition serait perpétuée, par-delà la mort de celui qui l'a initiée. Les actions sont revendiquées par un certain Sam Porpora; mais Jeff Jerome considère que celui-ci ne peut en être l'auteur.

Face à un mystère quasi institutionnel, la déception semble régner.

Alors, c'est qui?

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30 novembre 2009 1 30 /11 /novembre /2009 22:50

A la faveur d'un voyage dans la cité de pèlerinage portugaise de Braga, j'ai emporté dans mes bagages deux livres - trois même, pour être précis, mais deux plus particulièrement en phase avec le climat supposé de l'endroit: "Le Signe de l'Archange" de Frédéric Bovis, dont je vous ai donné un reflet il y a quelques jours, et une biographie de Pier Giorgio Frassati, bienheureux italien, écrite et publiée par le Jésuite Victor Marmoiton en... 1932. Ce livre est d'une lecture agréable; entre naïveté enjolivante et hagiographie laudative, il retrace le portrait d'un jeune homme à la foi communicative, décédé d'une maladie subite alors qu'il n'avait que 24 ans. De quoi réfléchir sur notre humaine nature...

... mais du point de vue du blogolecteur, un tel livre renvoie le maître de céans à la solitude qu'il ressent parfois lorsqu'il parle de tel ou tel ouvrage. Du fait de son ancienneté, celui-ci échappera sans doute à l'essentiel de la blogosphère - moi-même, je l'ai trouvé au gré d'un pur hasard et l'ai embarqué par une curiosité totale, ne sachant même pas qui était ce Pier Giorgio Frassati. Cela, sans parler de sa thématique: les blogolecteurs abordent rarement les vies de saints. Si quelqu'un a lu celle-ci, je l'invite à me faire coucou!

L'ancienneté fait partie des critères qui peuvent écarter durablement un livre de l'intérêt de la blogosphère du livre. Le plus souvent, celle-ci aborde l'actualité du livre, largement couverte, et les classiques, dont les plus célèbres trouveront sans peine leur commentateur ou leur commentatrice. Cela dessine une zone grise (pour ne pas dire blanche) de romans oubliés, dont les caractéristiques sont les suivantes: texte publié avant l'explosion des blogs (donc avant les années 2000) et texte oublié par ceux qui décrétèrent un jour que tel ou tel auteur est un classique à enseigner dans les écoles, le sauvant ainsi de l'anonymat. La notion de classique peut s'étendre à des auteurs modernes, certes - vous n'aurez aucun problème à trouver dans la blogosphère du livre un billet sur "Carrie" de Stephen King. Est-ce que ce sera aussi facile pour "La Luronne" de Charlotte Wagner ou pour les romans d'Antonin Reschal? "De l'instruction de Monsieur le Dauphin" est probablement le livre le plus vieux que j'aie lu dans une édition contemporaine à sa parution. L'auteur? François de La Mothe Le Vayer. Tout cela a paru chez Louis Billaine, vers 1664.

On me dira que ces derniers sont aujourd'hui difficiles d'accès, et on aura bien raison - ce qui amène un autre paramètre, celui de la rareté du livre au moment où le blogolecteur se met en quête de nouvelles lectures. Les librairies recèlent un choix qu'il faut bien qualifier d'époustouflant, certes; mais tout un monde du livre leur échappe, et pas forcément un monde moisi... Il y a d'abord les littératures étrangères: trouve-t-on facilement, en France, en Belgique ou au Québec, des livres suisses? Et vice versa? Sans parler des ouvrages publiés pour une audience régionale par de petits éditeurs. Dans le même ordre d'idées, les traductions constituent un tri préalable qui conditionne les choix des lecteurs, s'ils ne peuvent ou ne veulent pas lire en version originale (citez-moi, au bol, un romancier philippin autre que José Rizal...). Les librairies ne recèlent guère, par ailleurs, d'ouvrages édités à compte d'auteur: cela dépend le plus souvent du bon vouloir de l'auteur, qui supplée aux carences de la distribution assurée par l'éditeur. Les petits éditeurs sont également peu représentés, sauf si l'un de leurs auteurs a la faveur d'un buzz. Enfin, il y a les écrivains qui s'auto-éditent ou choisissent le circuit des éditeurs en ligne et de l'impression à la demande. On touche là à des éléments fort confidentiels.

Et puis, il y a évidemment les éditeurs et auteurs rejetés d'office, jouissant d'une drôle de réputation: à part dans le cadre des Harlequinades, qui parlera des publications de la respectable maison Harlequin? Cela, alors qu'outre des romans à l'eau de rose bien connus, elle véhicule des textes de chick lit qui débordent le cadre somme toute étroit de ce qui se publie dans ce genre dans le domaine français (il n'y a qu'à traîner dans une librairie germanophone pour voir que nos amis allemands ont de l'avance...). Et qui a osé commenter de manière bien circonstanciée un roman de San-Antonio? Tiens, voilà une idée de challenge, si cela peut amuser quelque blogolecteur en 2010...

... goûtez-vous donc à ces lectures confidentielles, à ces textes dont personne ne parle mais qui peuvent être fort jouissifs? Ressentez-vous, amis lecteurs ou blogueurs (ou les deux), une certaine fierté à partager avec d'autres lecteurs des expériences de lecture rarissimes? Parlez-en en commentaire; ou, mieux encore, témoignez de vos perles les plus rares, les plus secrètes, les plus méconnues, à la faveur d'un billet sur votre propre blog. Je vous y invite, si le coeur vous en dit.

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10 novembre 2009 2 10 /11 /novembre /2009 22:58

Image hébergée par Casimages.com : votre hébergeur d images simple et gratuitIl y a quelques jours, je vous parlais des vicissitudes du lecteur de fond, celui qui s'attaque à des ouvrages de longue haleine dépassant allègrement les mille pages. A présent, j'ai envie d'évoquer l'extrême inverse, à savoir les ouvrages particulièrement brefs - pour être plus précis, ceux dont l'épaisseur se situe en dessous de la barre psychologique des 200 pages. Et de partager ce que je ressens par rapport à eux. L'enjeu n'est pas nul, alors qu'un challenge "Folio 2 euros", lancé par l'excellente Cynthia, fait actuellement un tabac...

De mon côté, j'ai une position ambivalente vis-à-vis de tels ouvrages - que je vous expose ici.

On est en effet tenté, et je le suis aussi, de se dire qu'un tout petit livre, ce sera vite lu et permettra de découvrir à bon compte la prose d'un nouvel écrivain. Deux euros, dans un cas extrême (celui de la collection citée), c'est peu de chose: certes, cela ne suffit plus à payer un café en Suisse, mais l'ouvrage acheté à ce prix dure plus longtemps. Cela implique donc une profusion de tels ouvrages dans une PAL: on se dit que ce sera vite lu, et que l'"objectif PAL" sera vite atteint. Et puis, découvrir un auteur, quoi de plus louable? La tentation est donc grande de s'en procurer dès que possible: si en plus la découverte ne coûte pas cher... Cela, d'autant plus qu'au moment de l'achat ou de la lecture, les tout petits livres prennent peu de place dans un sac, voire dans une poche - et qu'on ne regrette pas, ou si peu, l'argent ou le temps investi si d'aventure il déplaît.

Effet pervers: puisqu'on se dit que le "petit livre" sera vite lu, on s'efforce de faire en sorte de le lire en peu de temps. Dès lors, deux cas de figure, sachant qu'un livre réclame son dû en minutes: soit on lui consacre le temps qu'on souhaite, quitte à sacrifier d'autres choses et à lire à marches forcées pour l'avoir fini dans la journée même où on l'a commencé (belle victoire, allez!), soit on lit à son rythme... et on est frustré de ne pas l'avoir lu dans la journée, justement: après tout, un petit livre, ça se dévore en une bouchée, non? Et une bouchée qui dure trois jours, vous l'accorderez, c'est un peu indigeste.

Résultat de cet effet pervers: on se réserve les livres courts pour les périodes où on a vraiment du temps, genre deux ou trois heures devant soi pour ne se consacrer qu'au dernier Nothomb. Or, à une époque où le temps est un luxe plus précieux qu'une rivière de diamants, rares sont les heures qu'on peut ainsi aligner! Et ne venez pas me parler d'heures d'avion: si je pars en voyage, je préfère avoir un gros livre que plusieurs tout petits qui s'égaillent dans mes bagages. Sans compter qu'embarquer avec soi un tout petit livre (ou même plusieurs), c'est s'exposer à la panne sèche de lecture, douleur à nulle autre pareille pour le Lecteur Compulsif Anonyme. Quant à moi, j'aime avoir de la réserve, et je calcule large...

Du coup, ces ouvrages très courts finissent par prendre racine dans les piles à lire, faute d'avoir trois heures devant soi pour n'en faire qu'une bouchée... et quand il s'agit de déstocker (par exemple dans le cadre d'un challenge "Objectif PAL"), c'est fastidieux... à moins qu'on n'y prenne un plaisir incommensurable! Reste qu'on ne voit pas la pile diminuer...

... alors, êtes-vous plutôt du genre "Je prends un gros livre, ça fait plaisir et ça fait une monstre place sur la PAL" ou "Je trie le gravier à la main"? Cela, naturellement, sans jamais oublier la notion du plaisir de lecture...!

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14 octobre 2009 3 14 /10 /octobre /2009 22:01

Pour commencer, que ma réponse soit franche et directe: pas bac! Mais pas pour les raisons de bienséance qu'on agite habituellement...

"Ars Amandi" n'est rien d'autre que le titre original de "L'Art d'aimer" d'Ovide, ouvrage proposé comme unique sujet de bac pour jeunes Français qui vont le passer bientôt - en 2010 si j'ai bien compris. Ce choix fait l'objet de polémiques, en particulier dans les milieux les plus conservateurs. On peut leur concéder que l'instruction publique française aurait dû laisser aux étudiants un choix entre plusieurs oeuvres, afin de répondre aux goûts de chacun - voire de guider le choix des professeurs de manière plus souple, en leur imposant d'examiner l'étudiant sur un choix représentatif d'oeuvres (genre, forme, époque, etc.). Aux plus obtus, on répliquera que l'"Art d'aimer" d'Ovide fait partie du patrimoine littéraire occidental, digne, à ce titre, de figurer dans les programmes scolaires en dépit de son sujet. Un argument qui a son poids.

J'ai envie de répliquer en partant de mon expérience personnelle - qui ne vaut rien du point de vue scientifique, mais pourra peut-être intéresser quelque lecteur passant par ici, latiniste ou non. J'ai lu deux fois, si je me souviens bien, ce récit - sans avoir jamais eu à rougir: l'auteur donne des ficelles, expose les lieux propices, etc. De quoi faire travailler l'imagination? Peut-être. Mais rien de directement exploitable, si j'ose ainsi m'exprimer.

Pourquoi, cependant, me suis-je intéressé à ce truc-là, au lieu de prendre exemple sur Jean-Claude Dusse comme tout le monde?

Peut-être parce que j'ai eu des professeurs et des collègues qui ont su titiller ma curiosité à propos de ce livre. La méthode, vous la connaissez tous: on laisse entendre qu'il y a un truc génial à découvrir, on lui confère une réputation qui sent un peu le soufre et le stupre, on insinue que le bibliothécaire vous fera les gros yeux si vous demandez ce titre, et hop: l'étudiant va sauter dessus, "par l'odeur alléché", comme dirait un fabuliste classique. Si l'enseignant sait y faire, il parviendra même à laisser entendre que ce genre de récit est interdit aux mineurs...

... et comme le goût de l'interdit est le meilleur moyen d'intéresser quelqu'un à quelque chose, tout le monde, moi y compris, s'est précipité sur l'ouvrage et y a trouvé de quoi se faire plaisir l'instant d'une lecture donnant l'impression de faire partie du cercle restreint de ceux qui sont admis à sa lecture. Le privilège d'avoir touché au fruit défendu, donc. Et, naturellement, d'avoir appris quelque chose de plus sur la civilisation romaine, avec un plaisir renforcé.

Supposons à présent que cet ouvrage figure dans les programmes scolaires. En institutionnalisant l'Art d'aimer, on l'émascule quelque part en lui ôtant ce goût de soufre qui attire: puisque c'est permis voire recommandé, c'est moins drôle. Peut-être qu'un professeur saura suggérer, d'un clin d'oeil ou d'une phrase malicieuse, quelque chose qui ressemble au goût sulfureux; mais tous les étudiants ne se prendront pas au jeu. Certains en seront même dégoûtés, simplement parce que c'est l'école qui le leur impose: j'ai connu de tels blocages sur des romans français, par exemple "Jacques le Fataliste et son maître" de Denis Diderot. Dommage! Et pendant qu'on fait semblant de s'amuser avec Ovide, peut-être oublie-t-on d'autres auteurs classiques qui n'ont pas, par nature, le même attrait: si un recueil de conseils amoureux est susceptible d'intéresser tout le monde, qu'en est-il, par exemple d'une "Vie des douze Césars"?

Laissons donc l'"Ars Amandi" aux enfers... afin qu'il conserve longtemps encore son goût inimitable d'ouvrage interdit!

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10 octobre 2009 6 10 /10 /octobre /2009 21:15

Amis lecteurs, sans doute vous est-il arrivé de vous lancer dans de véritables pavés - pas ces livres grassouillets qu'on vous propose au moment des grandes vacances, non, mais bien des volumes dépassant allégrement les mille pages en un seul volume, un seul roman, une seule oeuvre. Actuellement, je nage dans un texte de ce genre, dont j'ai hâte de rédiger le commentaire parce que c'est un volume à la fois méconnu et formidable - en ce qui concerne le titre et l'auteur, ce sera la surprise!

Reste que ce n'est pas la première fois que je m'embarque dans de pareilles aventures. L'an passé, il y eut par exemple "Moi, Charlotte Simmons" de Tom Wolfe - mon entrée dans l'univers de cet écrivain. La fin m'a paru ressembler à une pièce rapportée, telles que ces fins pas du tout en rapport avec le récit que critique G. B. Shaw dans Lsa postface à "Pygmalion"; mais force m'a été de constater que l'homme sait jouer de son style tout au long d'un récit finalement assez linéaire.

La diversité des styles est l'un des moteurs d'un autre ouvrage bien lourd, "Belle du Seigneur" d'Albert Cohen. Pour en venir à bout, je m'étais fixé des objectifs quotidiens: cinquante pages par jour. Mais ce roman m'a paru tellement génial que je n'ai eu aucun problème à les dépasser, ces cinquante pages! Il faut dire que j'avais du temps devant moi (j'étais en vacances) et que certains chapitres étaient fort brefs. Mais entre le grotesque et le sublime, j'ai tellement aimé ce roman que j'ai longtemps renâclé à me remettre à Albert Cohen... de peur d'être déçu par quelque autre de ses oeuvres. J'y suis revenu avec "Mangeclous", quelques années plus tard... et c'était délicieux! Même si là, c'est surtout le versant grotesque, hénaurme qui est privilégié.

La force de "Autant en emporte le vent" réside en revanche dans la profondeur de ses personnages - que ce soit la complexité de Scarlett O'Hara ("taratata!"), à la fois chipie à la gomme et femme suffisamment forte pour reconstruire, toujours et encore - et fantasmant sur le seul homme qu'elle déteste parce qu'il est seul à être capable de la faire régulièrement tourner en bourrique: Rhett Butler. Un jeu qu'on apprécie... Et en filigrane, c'est finalement les Etats-Unis de toujours, entreprenants et débrouillards, qu'on découvre dans cette oeuvre. 
Côté américain, il y a aussi eu "Ca" de Stephen King, un faux long roman puisqu'il se compose de trois volumes... je les ai tous lus sur trois ans, à raison d'un par an - soit 1500 pages scindées en trois. Des souvenirs? Après tant d'années, pas grand-chose, il faut bien l'avouer, même si sur le moment, on se dit que ça fonctionne bien.

Dans un tout autre domaine, le récit le plus long que j'ai lu est sans doute l'"Histoire de ma vie" de Jacques Casanova de Seingalt, tombeur et aventurier vénitien bien connu - plus de trois mille pages d'aventures, de récits délirants, de romances et de ruptures en douceur (car Casanova a toujours quitté ses femmes (un peu plus de 130) en bons termes). L'homme commence par narrer son enfance; pour les passages un peu croustillants, donc, il faut attendre un peu. Mais l'homme embarque son lecteur un peu partout en Europe - et sa vie est un véritable roman que je recommande à tout lecteur ambitieux - ou lectrice... L'édition parue dans "Bouquins" (version Brockhaus-Plon) est la plus fidèle au manuscrit original; c'est une force et une faiblesse: le français de l'auteur, italophone, n'est pas toujours au-dessus de tout soupçon. Je l'ai personnellement lu dans la version Paulin-Rozez, parue à Bruxelles dans les années 1880.

J'ajoute humblement qu'après deux tentatives, "Le Seigneur des anneaux" de Tolkien m'est tombé des mains après une centaine de pages.  

Et vous, quels sont vos rapports avec les très longs romans?

P. S.: les courageux s'attaqueront avec profit à l'"Astrée" d'Honoré d'Urfé, qui se déroule dans le Forez (donc à côté de Saint-Etienne; c'est de saison, puisque la Fête du livre aura lieu bientôt  - Lili s'y est essayée, avec un résultat mitigé) ou, surtout, à "Artamène ou le grand Cyrus" de Madeleine et Georges de Scudéry, considéré comme le plus long roman en langue française, soit 13095 pages dans l'édition originale). Et pour les amateurs inconditionnels du genre, le journal d'Henri-Frédéric Amiel est, paraît-il, pas mal non plus (17000 pages).

Pour lire "Artamène":
http://www.artamene.org   

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6 août 2009 4 06 /08 /août /2009 21:23

Passé ce soir chez Aerni, un commerce bernois spécialisé dans la beauté sous toutes ses formes, vêtements, coiffure, soins corporels et petits trucs à manger, qui organisait une soirée privée "Moët et Chandon". J'ai eu droit à ma flûte gratuite, comme tout le monde, mais me suis lamentablement planté au petit jeu de dés qui permettait d'embarquer un flacon de shampooing. On ne gagne pas à tous les coups...

... une personne, présente à l'événement, se distinguait en lisant des poèmes. D'après ce que j'ai pu voir à la dérobée, il ne s'agissait pas d'un recueil français, mais probablement d'oeuvres de T. S. Eliot, en anglais dans le texte. Et cela m'a fait penser à un paradoxe qui peut saisir le traducteur lorsqu'il empoigne un livre. Je vous le livre en vrac, en vous invitant au débat, au témoignage, au partage de ressenti - surtout si vous avez l'habitude de lire dans des langues étrangères dont vous maîtrisez les tournants.

Je me souviens en effet d'une autre personne, traductrice de métier, dûment diplômée (et actuellement cadre à la Confédération), qui me confiait il y a longtemps ne plus lire les romans dans leur traduction française: par déformation professionnelle, elle en détectait toutes les faiblesses, repérait sans faille les phrases qui sentaient la traduction un peu plus fort que les autres - on imagine par exemple un "evidence" anglais bêtement traduit par "évidence" plutôt que par "preuve"... Gênant!

De mon côté, c'est un peu différent mais le principe est le même: je peine à lire les textes dans leur langue originelle, surtout si je la maîtrise (allemand, anglais), parce que régulièrement, je me demande comment je pourrais bien rendre ça en français - de préférence en dépassant le simple mot-à-mot... C'est assez rageant aussi! Cela, sans compter qu'ayant été sensibilisé, je perçois aussi les phrases faibles des traductions de langues que je connais...

Illustration:
http://www.aernibern.ch

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