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22 mai 2016 7 22 /05 /mai /2016 19:56

Vallotton EscalesLu par Francis Richard, Inma Abbet,

Le blog de l'auteur, le site de l'éditeur.

 

Le lecteur qui se plonge dans "Escales" après avoir goûté le sensible et esthétisant récit "Journal de la haine et autres douleurs" va se retrouver en terrain connu. En effet, l'écrivain romand Frédéric Vallotton creuse à nouveau son propre personnage. "Escales" est un récit; c'est aussi la collection de chroniques courtes notées en voyage à l'aide d'un stylo-plume polonais dans un carnet Moleskine, gage d'esthétisme.

 

Esthétisme? Indéniablement, on retrouve dans "Escales" un narrateur esthète, attaché aux objets qui ont un parcours de vie aussi sinueux que possible. Le narrateur ne recule par exemple dans devant l'achat d'un souvenir fabriqué en Chine et vendu en Europe du nord: dans son esprit, l'idée d'imaginer le voyage d'un objet - une tasse à thé, par exemple - entre plusieurs continents, avant d'arriver dans son méconnu canton de Vaud, suffit à lui donner une attachante valeur sentimentale.

 

Si les objets voyagent, l'auteur n'en fait pas moins - donnant à "Escales" l'impression d'une mobilité tous azimuts. Articulé en deux parties, ce livre relate de manière lâche deux croisières, l'une dans le nord de l'Europe, l'autre en Méditerranée. On se souvient qu'à l'issue du livre "Journal de la haine et autres douleurs", il était aisé de penser au "Odio profanum pecus et arceo" d'Horace. "Escales" va un peu plus loin. Certes, ce n'est pas forcément à sa propre initiative que l'auteur est parti en croisière: c'est plutôt Cy., son compagnon, qui joue le rôle de moteur. Mais force est de constater que le narrateur joue parfaitement le jeu. La narration pointe certaines surprises du voyage et offre une réflexion sur cette manière particulière, strictement cadrée et confinée, de voir le monde. Mais, et c'est important aussi, l'écrivain assume parfaitement le fait d'être l'un de ces "blaireaux de luxe" qui voyagent de port en port en bateau pour découvrir quelques merveilles du monde.

 

Et si le narrateur embarque sur les chemins balisés des croisières commerciales, son esprit ne peut s'empêcher de voyager plus loin encore, en particulier dans les souvenirs. Il sera donc aussi question d'une expédition homérique en bus Greyhound vers les chutes du Niagara, ou, tant qu'à faire, vers New York et la statue de la Liberté. Cela, sans oublier quelques notes acerbes sur la construction problématique de l'aéroport de Berlin Schoenefeld. Berlin, élément pivot de la vie et des livres de Frédéric Vallotton...

 

Avec "Escales", l'auteur romand Frédéric Vallotton montre un talent d'écrivain voyageur. Certes ancré dans son terroir morgien (l'auteur y est actif en politique), "Escales" emprunte les sentiers hyper-balisés de deux croisières et s'offre ce prétexte pour faire errer les esprits des lecteurs. Une pointe de misanthropie, attendue certes, affleure au détour de certaines phrases. Mais cela n'empêche pas de s'embarquer dans "Escales", qui se rèvèle une suite à "Journal de haine et autres douleurs", narrée dans une écriture certes travaillée, mais moins esthétisante et donc plus flatteuse pour tout lecteur.

 

Frédéric Vallotton, Escales, La Chaux-de-Fonds, Olivier Morattel Editeur, 2016.

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5 août 2015 3 05 /08 /août /2015 21:32

Vallotton JournalLu par Amandine Glévarec, Francis Richard.

Le blog de l'auteur, le site de l'éditeur (merci pour l'envoi!).

 

"J'ai laissé quelque chose à Vienne, quelque chose de précieux qui m'avait été offert à Berlin." Un incipit qui est tout un programme, celui des pages qui composent le "Journal de la haine et autres douleurs". Un programme, pour ne pas dire un leitmotiv, puisque le huitième livre de Frédéric Vallotton partage avec son lectorat une blessure sentimentale et quelques fureurs et humeurs qui, rapidement, évoquent par moments le poète latin Horace: "Odi vulgum pecus et arceo". Ce "Journal" est suivi de "Musique dans la Karl Johan Strasse".

 

Misanthropie, misogynie? Ou simple dégoût des foules? Dans ce livre aux apparences de journal extime rédigé en 2008, l'auteur relève ce que la fréquentation de ses semblables, dans certaines circonstances, peut avoir d'odieux pour lui. Celui qui se définit comme un "auteur germanique de langue française" se sent certes à l'aise dans les villes de Berlin ou de Vienne, mais ne l'est guère du côté de Lausanne et de l'Arc lémanique.

 

S'il se livre à coeur ouvert, avec une cordiale sincérité, l'auteur ne manque pas de céder à une esthétique du leitmotiv à la Richard Wagner, pour mettre des mots, des éléments de phrase récurrents, sur la haine - et tourner autour d'elle comme l'on tourne à l'occasion d'une valse viennoise, d'une manière structurée, pour ainsi dire géométrique. Les références littéraires sont présentes aussi; et si Mauriac affleure, c'est surtout les auteurs germaniques, Thomas Mann en tête, qui occupent le terrain. On pourrait enfin rapprocher le souci d'esthétique littéraire de l'auteur d'un souci à maintes reprises évoqué de maintien du corps à travers les ans, assuré à coups de séances de fitness.

 

"Musique dans la Karl Johan Strasse" occupe la deuxième partie du livre. Débarrassé de ce système de leitmotiv, ce second journal, rédigé en 2014, apparaît plus souple et organique. Le titre fait référence à une oeuvre d'Edvard Munch, et s'avère programmatique: les jalons de cette séquence sont des expositions d'art visitées çà et là. Prolongeant les thèmes abordés dans le "Journal de la haine et autres douleurs", le diariste, en vagabond improbable ("Wanderer"), y explore différentes facettes de son identité, telle l'homosexualité, les sentiments perdus et retrouvés (figure de Cy.), mais aussi le mal de vivre, tiraillé entre des lieux chéris mais lointains. Et aussi le fait de n'être plus jeune, sans être franchement vieux: juste entre deux âges.

 

Les pages du huitième livre de Frédéric Vallotton mettent à nu une personnalité tourmentée, digne dans sa haine. Elle apparaît avec une franchise et une sincérité que le souci esthétique n'altère pas et qui, du coup, saura interpeller le lecteur, le faire sortir de sa zone de confort en l'interpellant, et ne saurait donc le laisser indifférent.

 

Frédéric Vallotton, Journal de la haine et autres douleurs, Lausanne/La Chaux-de-Fonds, Olivier Morattel Editeur, 2015.

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