La
nouvelle en a surpris plus d'un: Benoît XVI, pape catholique (photo), a choisi de se retirer de ses fonctions d'évêque de Rome. Un événement suffisamment rare pour qu'il mérite qu'on agite
quelque poussière. Et côté lecteurs, que faire si l'on veut suivre la tendance? La papauté a inspiré les écrivains, d'inspiration catholique ou non, pour la bénir ou la vilipender. Dès lors, les
suggestions ne manquent pas. En toute modestie, voici deux ou trois suggestions:
- Les aficionados de la liturgie n'hésiteront pas à mettre le nez dans la prose de Joseph Ratzinger lui-même... avant qu'il ne devienne Benoît XVI, il a en effet donné L'Esprit de la liturgie, un ouvrage dont le début est un peu difficile, mais dont l'essentiel reste accessible au fidèle normal et ne saurait révolter celles et ceux qui ont déjà creusé le sujet. Rétrograde? Certainement pas. Conservateur? Sans doute, d'autant plus que l'auteur rappelle que le grégorien reste la musique de l'église catholique. Mais, pour ce qui est de mes souvenirs de lecteur, ce conservatisme doit être vu dans le bon sens du terme: l'Eglise se veut un point de repère solide dans un monde en perpétuelle mutation, et c'est dans cet esprit qu'il faut voir cet ouvrage.
- Les amateurs d'histoire s'offusqueront ou s'ébaudiront des deux volumes des "Borgia" de Claude Mossé: Les Fauves et La Chair et le Sang. Ce sont des romans solidement construits, efficaces à défaut d'être géniaux, qui devraient séduire les amateurs d'intrigues sur fond historique. Sur le même sujet, je garde un souvenir plus lointain de "La Rome des Borgia" de Guillaume Apollinaire - tout au plus me semble-t-il qu'on s'empoisonne beaucoup dans ce roman. Il est à noter, enfin, que d'autres écrivains ont tâté de la sulfureuse épopée des Borgia; je vous laisse découvrir ce monde romanesque.
- Dans un domaine plus récent, je garde aussi un très, très bon souvenir du roman Le dernier Pape de Gabriel Véraldi et Jacques Paternot, qui a hélas été trop peu lu (éd. L'Age d'Homme). Se fondant sur une légende qu'on raconte aux touristes qui visitent le Vatican, l'auteur imagine la crise mondiale que pourrait générer la déclaration d'un pape au sujet de la fin de sa fonction. Cela lui sert de prétexte pour retracer trois quarts de siècle d'histoire, entre coulisses du Vatican, chute du communisme et arcanes de la politique. C'est du costaud, mais les amateurs de politique-fiction y trouveront leur compte, dans un texte solidement documenté (les références sont données en fin d'ouvrage) qui ne les prend pas pour des abrutis. Amateurs d'intrigues, foncez, c'est du lourd.
- A noter qu'aujourd'hui même, Edouard Brasey doit avoir le sourire: l'un des ses romans s'intitule justement Le dernier pape. Il faudra encore que je le lise, mais j'ai justement tiqué, en voyant ce titre, parce que c'est le même que celui du roman de Gabriel Véraldi et Jacques Paternot.
- Les plus curieux et les nostalgiques de Jean-Paul II se jetteront avec profit sur "La Boutique de l'orfèvre", pièce de théâtre de Karol Vojtyla. Je ne peux pas en dire beaucoup plus parce que je ne l'ai pas vue, hélas...
- Et j'allais oublier Le Martyre du pape Kevin de Michaël Perruchoud, fulgurant roman d'anticipation qui imagine qu'un jeune homme cool (32 ans, surfeur) est nommé pape... victime de communicants intéressés, saura-t-il remplir sa mission de réévangélisation? L'auteur interroge ses lecteurs sur le mode humoristique, quitte à oser l'outrance et le deuxième degré dans un roman qui se souvient des épisodes burlesques de l'actualité de son époque.
C'est peu de chose, et plus d'un d'entre vous pourra facilement allonger la liste des lectures papales, j'en suis persuadé. Le tout pourra être lu tout en dégustant un Châteauneuf-du-Pape ou un petit vin plus rare - par exemple l'une des déclinaisons du Pape Noir. Certains verront une vision d'avenir dans tout cela, d'autres feront d'illusoires pronostics en éclusant moult canons et en tournant moult pages; pour moi, avec ou sans souverain pontife, c'est surtout une occasion de trinquer à la santé des êtres chers!