Une facebookonaute risque de se souvenir longtemps de s'être aventurée sur le site de réseautage le plus fameux du monde depuis chez elle, un jour où elle était malade: une semaine après sa journée de congé maladie, le chef la convoque dans son bureau et la licencie sans ménagement. Motif? Si elle peut surfer sur Facebook, c'est qu'elle n'est pas si malade que ça... et aurait bien pu se rendre au travail. L'affaire s'est déroulée à Bâle (Suisse), et a fait la une du gratuit "20 minutes" de ce jour. Le genre de sujet dont ce type de journal est friand...
... mais l'affaire pose plusieurs questions. On la rapprochera volontiers du cas, relaté
par Sébastien Fanti dans son ouvrage "Alcatraz numérique" (qui sort ces jours chez l'éditeur veveysan Xenia), du bonhomme qui prend un congé maladie pour cuver un lendemain d'hier mal assumé...
et s'en vante dans son statut, également depuis chez lui. Le patron, ou une bonne âme aux tendances mouchardes, et hop: viré sans façons. Le réseau social serait-il un réseau d'espionnage? Le
juriste valaisan Sébastien Fanti l'affirme, et avance même, dans une interview accordée à "L'Illustré", que des espions de métier rôdent. Bref, Facebook implique de repenser sa sphère privée,
c'est le moins qu'on puisse dire!
Une différence, cependant, sépare ces deux cas. Le second relève d'un mensonge: pour se relever d'une gueule de bois (donc d'un comportement peu responsable la veille), le bonhomme prend un congé
maladie et ment donc à son employeur, délibérément. Et pour couronner le tout, il s'en vante publiquement - autant dire qu'il prend son chef pour un imbécile. Le second cas, lui, est plus
tendancieux, et "20 minutes", pour une fois correct d'un point de vue journalistique, propose l'analyse d'un expert bâlois, Matthias Häuptli, spécialiste du droit du travail. Sa position est en
effet un rien différente de celle de l'employeur: il considère qu'après tout, surfer sur Internet n'est pas forcément impossible à une personne que la maladie peut par ailleurs rendre inapte à
aller au travail. On le comprend: un bonhomme qui a la jambe cassée a certes besoin de repos, mais il n'est pas non plus obligé de regarder les mouches voler depuis son lit! L'expert conclut en
déclarant que surfer sur Internet, c'est finalement comme lire le journal. Est-ce interdit aux malades?
A l'heure où les entreprises considèrent Facebook d'un oeil suspicieux, voire en bloquent l'accès à leur personnel, on peut par ailleurs s'interroger sur le procédé consistant à espionner le
personnel - des soupçons existent dans le cas bâlois. Est-ce que ce suivi est effectué dans le cadre du travail? Les décideurs seraient alors un peu plus égaux que leurs collaborateurs face
aux outils informatiques.
Moralité? Faites gaffe quand même... Big Face Is Watching You!
Sébastien Fanti, Alcatraz numérique, Vevey, Xenia, 2009.
Photo: http://www.trend-setter.com. Et lui,
fréquente-t-il Facebook quand il est malade?