7 septembre 2008
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Avec un titre pareil, l'auteur annonce clairement la couleur: son ouvrage est une enquête à charge, ambitionnant de présenter à ses lecteurs tout ce que le téléphone portable peut avoir de dangereux. Certaines pages sont assez virulentes, ce qui tranche avec la présentation très sérieuse et modérée que l'auteur en a faite chez Ruquier au moment de sa parution.
Tout cela commence comme un roman - une option sympathique de la part de l'auteur, mais malheureusement peu suivie au fil des pages: l'avocat reçoit la visite de deux représentants de l'association Priartem, critique face au téléphone portable et aux antennes. Il choisit de les défendre face aux juges et, béotien en matière de technique, décide de se renseigner. Sa compagne devient peu à peu aussi convaincue que lui, voire plus, ce qui donne de jolies pages de recherches à deux voix.
Donner la forme d'un roman au début du livre est une bonne idée: l'auteur choisit d'aborder en premier les questions techniques. Il démontre ainsi que les ondes des téléphones portables et celles de votre four micro-ondes sont parentes, et que les technologies utilisées ont été abandonnées par les armées... parce qu'elles étaient malsaines pour les militaires de carrière. Les cas des antennes sont abordés, et illustrés par l'affaire Nadine Jeanjon (agricultrice qui voit tous ses poussins crever dans l'oeuf depuis qu'on a installé une antenne près de chez elle) et l'affaire de Saint-Cyr-l'Ecole (cancers chez des enfants).
Richard Forget présente également des rapports volontiers occultés parce qu'ils mettent en avant le caractère potentiellement dangereux des ondes utilisées pour faire fonctionner les portables. "Le dossier noir du portable" est bien étayé, et met aussi en évidence les collusions d'intérêts touchant certains chercheurs tendant à minimiser les risques. Jouer à se faire peur? De telles recherches, et les pressions exercées sur certains scientifiques, tendent à mon avis à démontrer qu'il y a anguille sous roche.
Je dois dire que j'attendais Richard Forget au tournant en ce qui concerne les aspects sociaux, qu'on oublie volontiers, mais qui ont été abordés par ailleurs dans un bref texte paru dans le livre collectif "La Tyrannie technologique". Eh bien... l'auteur ne les oublie pas! Il rappelle que la recherche du coltan, matériau indispensable à la production de ces appareils, est à l'origine de guerres civiles et de la disparition de gorilles en Afrique; il évoque les sonneries intempestives, les conversations indiscrètes, les possibilités de flicage qu'offre un appareil qu'on peut localiser en permanence même s'il est éteint, etc.
Fort complet donc, l'ouvrage est celui d'un homme étonné par l'étendue de la cause qu'il s'apprête à défendre, et qui est de plus en plus conquis par celle-ci. Avocat, juge, partie? L'homme sait en tout cas intéresser son lectorat grâce à des chapitres brefs. Un regret? L'ouvrage ne présente pas de bibliographie structurée. En revanche, il renvoie notamment au site Internet http://www.next-up.org, très fouillé et spécialisé dans les risques liés à la technologie.
Regards critiques sur le téléphone portable:
Richard Forget, Le dossier noir du portable, Pharos/Jacques-Marie Laffont, 2006.
Collectif, La tyrannie technologique, L'Echappée, 2007.
Versant plus cocasse:
Phil Marso, Tueur de portable sans mobile apparent, Mégacom-Ik, 1999.
Phil Marso est le créateur de la journée mondiale sans portable, fixée au 6 février.