24 août 2008
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Il y a celui d'Olivier Mathieu, il y a aussi celui de
Philippe Routier: les passages à niveau se sont succédé dans mes lectures, et le présent blog reflète cette approche en proposant une note de lecture sur ledit ouvrage.
Philippe Routier porte un nom contradictoire puisqu'il travaille à la SNCF. Baron du rail? Peut-être, mais surtout un auteur qui connaît les arcanes de l'entreprise qui l'occupe. Le lecteur est donc immédiatement frappé par la richesse et la précision de la terminologie employée, qui confère à l'ouvrage un supplément de précision. De l'autre côté, c'est aussi un état d'esprit que l'auteur cherche à recréer, par exemple en rappelant que les pilotes de locomotives (ou "mécaniciens") sont les "barons du rail", justement.
Philippe Routier aborde du reste, dans ce roman, une autre problématique beaucoup plus grave: les mécaniciens qui tuent accidentellement des personnes dans l'exercice de leurs fonctions. Il y a les suicidaires, qu'évoque d'ailleurs l'écrivain suisse Martin Suter dans "Un ami parfait"; ici, le personnage principal, nommé Guillaume, fonce dans une voiture qui contient trois personnes, tuées sur le coup. L'auteur montre peu les psychologues d'entreprise, et ne les présente pas sur un jour vraiment favorable. Il préfère s'attacher à son personnage principal, à l'étoffer en le poussant à découvrir qui il a tué par accident.
Les rencontres se font donc, le dialogue s'installe, amer, voire évité: le responsable ne cherchera pas à discuter de l'affaire au bistrot, où se trouvent des journaux qui relatent l'affaire. Elle joue également un rôle de catalyseur de la vie de couple du personnage principal. Son couple est en effet à la croisée des chemins: mariage ou pas? A noter que son épouse Alice a de l'ambition pour deux; Guillaume se trouve donc souvent en position de subir les événements plutôt que d'agir, même si c'est pour un mieux dans sa carrière. Alice ne comprend pas pourquoi Guillaume souhaite réintégrer le poste d'enclenchement d'où il est sorti pour conduire des trains, ce qui décidera du sort du couple. Mais est-on forcément moins responsable de morts accidentelles quand on est plus loin de l'événement?
Le titre, enfin, rappelle une autre problématique de tous les chemins de fer du monde: les passages à niveau dangereux - non gardés, aveugles, mal situés, etc. Guillaume va interroger assez brusquement le maire de son village (où a eu lieu l'accident), et soupçonner sourdement son épouse, membre du conseil communal, de n'avoir rien fait pour ce passage à niveau. Pour Philippe Routier, c'est l'occasion de montrer comment il est possible de se renvoyer des responsabilités.
En dépit d'un ton volontiers amer, ce petit roman se lit facilement et rapidement, construit qu'il est en brefs chapitres. Au final, c'est un bon souvenir.
Philippe Routier, Le Passage à niveau, Paris, Le Livre de Poche, 2008.
Martin Suter, Un ami parfait, Paris, Points, 2003.
Philippe Routier porte un nom contradictoire puisqu'il travaille à la SNCF. Baron du rail? Peut-être, mais surtout un auteur qui connaît les arcanes de l'entreprise qui l'occupe. Le lecteur est donc immédiatement frappé par la richesse et la précision de la terminologie employée, qui confère à l'ouvrage un supplément de précision. De l'autre côté, c'est aussi un état d'esprit que l'auteur cherche à recréer, par exemple en rappelant que les pilotes de locomotives (ou "mécaniciens") sont les "barons du rail", justement.
Philippe Routier aborde du reste, dans ce roman, une autre problématique beaucoup plus grave: les mécaniciens qui tuent accidentellement des personnes dans l'exercice de leurs fonctions. Il y a les suicidaires, qu'évoque d'ailleurs l'écrivain suisse Martin Suter dans "Un ami parfait"; ici, le personnage principal, nommé Guillaume, fonce dans une voiture qui contient trois personnes, tuées sur le coup. L'auteur montre peu les psychologues d'entreprise, et ne les présente pas sur un jour vraiment favorable. Il préfère s'attacher à son personnage principal, à l'étoffer en le poussant à découvrir qui il a tué par accident.
Les rencontres se font donc, le dialogue s'installe, amer, voire évité: le responsable ne cherchera pas à discuter de l'affaire au bistrot, où se trouvent des journaux qui relatent l'affaire. Elle joue également un rôle de catalyseur de la vie de couple du personnage principal. Son couple est en effet à la croisée des chemins: mariage ou pas? A noter que son épouse Alice a de l'ambition pour deux; Guillaume se trouve donc souvent en position de subir les événements plutôt que d'agir, même si c'est pour un mieux dans sa carrière. Alice ne comprend pas pourquoi Guillaume souhaite réintégrer le poste d'enclenchement d'où il est sorti pour conduire des trains, ce qui décidera du sort du couple. Mais est-on forcément moins responsable de morts accidentelles quand on est plus loin de l'événement?
Le titre, enfin, rappelle une autre problématique de tous les chemins de fer du monde: les passages à niveau dangereux - non gardés, aveugles, mal situés, etc. Guillaume va interroger assez brusquement le maire de son village (où a eu lieu l'accident), et soupçonner sourdement son épouse, membre du conseil communal, de n'avoir rien fait pour ce passage à niveau. Pour Philippe Routier, c'est l'occasion de montrer comment il est possible de se renvoyer des responsabilités.
En dépit d'un ton volontiers amer, ce petit roman se lit facilement et rapidement, construit qu'il est en brefs chapitres. Au final, c'est un bon souvenir.
Philippe Routier, Le Passage à niveau, Paris, Le Livre de Poche, 2008.
Martin Suter, Un ami parfait, Paris, Points, 2003.