Serais-je devenu mystique tout d'un coup? Que nenni. Mais j'aimerais brièvement vous faire part de la découverte que j'ai faite ce
week-end, au gré d'une lecture, d'un monde méconnu, celui de l'exorcisme. Oui, comme dans les films - à part que là, c'est pour de vrai. Le film est du reste évoqué par certains praticiens, et
reconnu comme assez réaliste...
J'ai en effet terminé hier soir l'ouvrage "Les exorcistes du Vatican", signé Tracy Wilkinson, qui retrace sur 249 pages un panorama assez complet de la profession, ou plutôt du minstère
d'exorciste. Un ministère qui fait partie intégrante du catholicisme, et exige de celui qui le pratique suffisamment de sainteté pour faire face au diable ou au démon sans perdre la face. Cela,
sans oublier qu'il faut avoir été ordonné prêtre...
L'auteur plonge son lecteur dans cet univers sombre et souvent saisissant à la manière d'une journaliste, certes, avec une approche qui s'efforce de garder la tête froide et de rester
rationnelle. Mais elle parvient à dépasser les préjugés qui frappent trop de ses confrères dès qu'il s'agit de religion, et cherche, souvent avec succès, à entrer dans le raisonnement (si j'ose
ce mot) propre à la religion - cette ambivalence est patente dans l'historique et l'état des lieux qu'elle propose de l'exorcisme en début de volume. On apprécie également ses portraits
d'exorcistes fameux, tels Emmanuel Milingo (un archevêque africain qui s'était par ailleurs distingué en épousant une adepte de la secte Moon, et pratique des exorcismes collectifs en Italie) ou
Gabriele Amorth (qui a une approche plus orthodoxe de son ministère), mais aussi de "patients" partiellement ou totalement guéris de l'emprise du Malin - des gens très ordinaires, souvent
des femmes (les trois témoignages retenus émanent de femmes), médecins, professeurs de danse, etc.
Elle n'oublie pas de donner la voix aux sceptiques, dont l'approche réduit le plus souvent les phénomènes liés aux exorcismes à des attitudes psychologiques. Qui a raison? C'est une question de
foi, comme en toute affaire religieuse. L'aspect "maladie mentale" est du reste pris en compte par les exorcistes eux-mêmes, ou devrait au moins l'être, l'exorcisme devant être, du point de vue
de l'Eglise, considéré comme une "ultima ratio", à ne pratiquer que quand tout le reste a échoué. A noter du reste que l'approche psychologisante (possession ou schizophrénie?) domine en
France, même au sein du clergé et de la corporation des exorcistes - c'est ce que dévoile une partie supplémentaire, spécialement consacrée à la soeur aînée de l'Eglise et rédigée par Anne
Mascret et Yvon Bertorello. C'est que Tracy Wilkinson, correspondante du "Los Angeles Times" à Rome, a effectué toute son enquête en Italie - où l'exorcisme jouit du reste d'une vogue sans
commune mesure.
Une faiblesse de l'ouvrage? Peut-être son approche des cultes sataniques, qui me paraît un rien réductrice puisqu'elle ramène cela à des actions émanant de jeunes sans repères. Mais c'est là un
milieu que j'ignore...
Tracy Wilkinson, Les exorcistes du Vatican, Paris, ViaMedia/Litté, 2007.