Vous avez dit "Kerngeschäft"? Ou, en
allemand de Zurich, "Core Business"? Ici, chez les Welches qui tiennent à leur patois, on préfère le coeur de métier. Parce que quand on aime son métier, on a du coeur à l'ouvrage. Et quand
on a du coeur à l'ouvrage, on bosse "à fond", comme le fait Rudolf Lang, le personnage principal du fascinant roman "La mort est mon métier", de Robert Merle.
Rudolf Lang semble prendre son temps avant de se trouver, avant de devenir ce qui fera de lui le nazi parfait, paradoxalement intègre et ne reconnaissant qu'un seul maître. J'ai commencé à lire
le roman qui le met en scène mardi. Le train qui me conduit à mon travail à Berne m'a donné l'occasion de faire un bout de lecture, ce qui m'a valu la question classique de la personne assise en
face de moi: "C'est bien?" Et assez à propos, je lui réponds: "Oui, mais je n'en suis pas encore au coeur de métier..."
... depuis, celui-ci se fait attendre, mais dans "La mort est mon métier", biographie romancée du responsable du camp d'Auschwitz, l'écrivain français Robert Merle sait jouer des gradations,
construire son récit à la façon d'une boule de neige, nourrissant son propos et le faisant grandir. je suis tombé là sur un roman de qualité, efficace, accrocheur, aux ambiances plombées très
bien rendues. J'aime.
Et pour le reste, Messieurs les lecteurs, visez au coeur...
Robert Merle, La mort est mon métier, Paris, Gallimard, 1952/Folio, 2005