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30 avril 2015 4 30 /04 /avril /2015 21:37

hebergement d'imageLu par Goliath, Laeti, Mina Merteuil.

Le site du livre chez l'éditeur.

Le blog (en sommeil) de l'auteure.

 

Aujourd'hui, c'est la Saint Robert. Jour rêvé, diraient les plus malicieux d'entre vous, pour parler du recueil de nouvelles "Le blondes à forte poitrine" de l'écrivaine belge Isabelle Baldacchino. Après un premier ouvrage intitulé "Le Manège des amertumes", l'auteure offre un livre où sa patte se reconnaît immanquablement, entre ironie et amertume. Le titre a un côté racoleur assumé: une nouvelle, "Chokotoffs", lui donne tout son sens et interroge sur le statut d'écrivain et la concurrence qui peut s'installer à une fête du livre.

 

Le lecteur appréciera l'impression d'unité qui se dégage de de recueil, avec des points de vue variés et des personnages dont la diversité naît d'un regard aigu porté sur des vies ordinaires. Elle naît d'objets récurrents, telles les chaises, mais aussi les seins des femmes (oui, le titre va plus loin que le simple racolage et s'avère un vrai programme, parfois grave), présents dans plus d'une nouvelle, de manière franche ou discrètement allusive. Résonnant entre deux textes, l'idée même de la perruque de blonde contribue à donner un esprit de corps au recueil. Quant à "Courbe de Bézier", cette nouvelle est rythmée par l'arrivée impromptue de chaises; empreinte d'une certaine absurdité, elle fait penser à Eugène Ionesco, mais aussi à "L'argent a été viré sur votre compte" de Dimitris Sotakis - et introduit finement un grain de sable dans une vie trop bien réglée.

 

L'auteur affectionne les points de vue qui changent et décoiffent, et les voix s'adaptent avec justesse. Elle se met à l'occasion dans la peau d'un homme, par exemple dans "Le long cri du A", relation d'un suicide en chute libre, qui aurait certes mérité un tout petit peu de travail supplémentaire sur le rythme mais se distingue par une observation pince-sans-rire de ce qui peut se passer dans un immeuble.

 

Quelques nouvelles prennent le contrepied d'une vie bien normée. Le lecteur se souvient par exemple de cet homme qui n'aime que les femmes laides ("J'aime"), ou le monologue de ce monsieur qui considère que sa femme est une salope: j'aurais aimé écrire cette nouvelle, "Coprolalie", aux accents emportés d'une confession adressée à la police, où les mots les plus dénigrants deviennent des hypocoristiques choisis. Certes, l'approche est brève et succincte, et les nouvelles sont courtes en général. Mais en se penchant sur l'univers de l'inavouable masculin, l'auteure s'approche du génie d'observation du David Foster Wallace de "Brefs entretiens avec des hommes hideux".

 

L'auteure est belge, enfin. Les situations et les références assument ce qu'elles ont de local: première communion ("Le bal des fantoches", qui utilise la première communion pour construire une belle nouvelle sur le passage brutal d'une femme à l'âge adulte), travail à la mine ("Marcasse", avec des ambiances à la Zola sur quelques pages). En se concentrant sur les moments amers ou difficiles, l'écrivaine leur confère une aura qui dépasse l'intérêt local. Il n'est même pas nécessaire de savoir ce que sont les "Chokotoffs" pour apprécier le sel de la nouvelle qui porte ce titre. Le lecteur attentif relèvera cependant qu'il y a bien des Chokotoffs en photo sur la page de couverture...

 

Variant les voix et les points de vue, Isabelle Baldacchino promène un regard distancié mais précis sur le monde qui nous entoure. Au fil de nouvelles le plus souvent courtes, parfois distinguées (l'une d'entre elles, "Au suivant!", a été lauréate du concours de nouvelles de la police de Liège et a paru dans le recueil "Strip-Tease", où apparaissent entre autres Hélène Dormond, Hélène Delhamende et votre serviteur), elle se fait peintre d'ambiances et de caractères. Et en quelques pages, elle parvient à chaque fois à créer tout un monde.

 

Isabelle Baldacchino, Les blondes à forte poitrine, Louvain-la-Neuve, Quadrature, 2015.

 

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