Lu dans le cadre des défis Rentrée littéraire, Thrillers et Vivent nos régions.
Sébastien Bouchery est un écrivain et éditeur stéphanois qui possède une expérience certaine du thriller sanglant et inventif. Il en avait donné la preuve l'an dernier avec "Raklur", dont je vous avais parlé. Force est de constater à présent qu'avec "Ma vie avec la mort", cet auteur va encore plus loin, sous plus d'un aspect.
Un mieux indéniable de la part de l'éditeur
Globalement et par rapport à "Raklur", le lecteur va se retrouver ici avec un roman d'atmosphère, plus resserré sur quelques bonnes idées: bienvenue la tension palpable, et exit les personnages hauts en couleur tels que la critique gastronomique anthropophage ou le médecin légiste nécrophile! Reste que Max, le légiste mis en scène ici, reste un personnage fascinant. Chouette: c'est lui que le lecteur va suivre.
Du côté du travail éditorial aussi, il y a un mieux: "Ma vie avec la mort" comprend beaucoup moins de coquilles et de soucis typographiques que "Raklur", et son écriture soignée permet une meilleure visualisation de ce qui se passe. Tout bénéfice pour l'agrément du lecteur!
Et puis il y a le double sens du titre: en sa qualité de médecin légiste, Max est habitué à côtoyer le versant maîtrisé de la mort chaque jour de sa vie professionnelle. Que va-t-il lui arriver lorsqu'il va devoir vivre au quotidien avec une menace de mort directe, sans qu'il ne puisse guère la maîtriser?
Un exercice d'équilibriste
J'ai dit que l'auteur était inventif. Il a réussi à créer un personnage de criminel particulièrement odieux, le Taxidermiste, qui, comme son nom l'indique, fourre de la paille et des objets dans le corps de ses victimes après les avoir tuées sauvagement. Comme il est sympa, il envoie aussi des cartes postales... Tout démarre lorsque Max, peut-être un peu trop honnête, donne au tribunal un témoignage qui allège la peine dudit Taxidermiste. On notera aussi la présence d'un personnage en fauteuil roulant, paralysé du haut en bas.
Tout le roman va dès lors se construire comme la montée inexorable d'une tension. Cela, sur des péripéties hétéroclites qui vont déconcerter le lecteur. Citons-en quelques-unes: Max et sa famille sont expédiés à Bandol, Max est aux prises avec son banquier au sujet de l'ouverture et de l'approvisionnement d'un compte en Suisse (Jérôme Cahuzac, sors de ce corps!), et les cartes postales reviennent. Cette fois, la cible, c'est Max.
Vraiment? L'auteur joue avec succès un jeu d'équilibriste, suggérant que Max peut être la victime du Taxidermiste, évadé, ou la victime de sa paranoïa, voire d'autre chose. Les réponses n'arrivent qu'en fin de roman - certaines un peu faciles (certains éléments n'auraient jamais vraiment existé), d'autres parfaitement éclairantes. Cela, jusqu'à la dernière balle...
Quant aux éléments qui donnent des couleurs au roman, ce sont les lieux qui se trouvent entre Lyon et la Loire, évoqués comme un décor discret. De manière plus massive, le lecteur cinéphile appréciera les innombrables références au cinéma, régulièrement explicitées, que l'auteur dissémine dans son propos. Notons encore, enfin, que l'auteur parvient à recycler certains éléments de "Raklur", ce qui fera sourire ceux qui le suivent...
Enfin, il y a le style, simple et efficace, comme il se doit pour un thriller de cet acabit. Force est de constater qu'on retrouve, avec "Ma vie avec la mort" et après "Raklur", la plume d'un écrivain qui a le chic pour empoigner son lecteur pour ne plus le lâcher.
Sébastien Bouchery, Ma vie avec la mort, Veauche, Eastern Editions, 2013.
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