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18 novembre 2013 1 18 /11 /novembre /2013 20:57

hebergeur imageLu dans le cadre des défis Nouvelles et Vivent nos régions!

Lu par Goliath.

 

Un recueil d'une centaine de pages, et trois nouvelles. Autant dire que Jean-Claude Garrigues, l'auteur de "La Vie en crue", prend son temps pour mettre en scène son propos. Pourtant, le lecteur n'a jamais l'impression de s'ennuyer au fil des pages de son recueil. Un recueil qui fleure bon la Côte d'Azur, la Provence et la lavande, et n'est pas exempt d'une certaine nostalgie. Cela, sans oublier ses personnages, débordants d'une "vie en crue", justement.

 

Ce débordement de vie s'exprime beaucoup par la parole des personnages. Après lecture, on pense par exemple à la mère Madeleine, que l'on découvre dans "La Montagne bleue": pour une bonne soeur, elle n'a pas fait voeu de silence, et c'est une bonne chose pour le lecteur: celui-ci découvre un personnage débordant d'une vie intérieure qui, si elle peut paraître tenir de la posture, n'en est pas moins de bonne foi. Cette vitalité contraste d'ailleurs subtilement avec les silences qui s'installent entre François, visiteur athée de sa soeur Marie-Odile, entrée dans les ordres religieux.

 

hebergeur imageVie débordante également avec le personnage de Marthe, qui hante "La vieille dame qui rêvait sur la plage". On pourrait se dire, en commençant la lecture de cette nouvelle, que c'est une aïeule sans histoire. Mais c'est d'aventure qu'il s'agit, entre Marseille et Paris: "[...] Marthe se dira que c'est à cet instant que tout s'est joué, que le quotidien a basculé dans l'insensé - ou plutôt ce qu'elle estime, elle, être l'insensé - et qu'une journée, somme toute quelconque - ou qu'elle avait imaginée comme telle -, a basculé dans la démesure, l'aventure". La fin de la nouvelle révèle avec tendresse le fin mot de l'affaire; avant, le lecteur est vraiment baladé d'une péripétie à l'autre, et invité à y croire... ou pas. Le réel connaît ainsi une frontière pour le moins floue avec l'imaginaire, voire avec la mythomanie la plus exubérante. A plus d'un titre, et si j'ose cette comparaison stéréotypée, Marthe, adepte des galéjades, est un peu marseillaise sur les bords... pour le plus grand plaisir du lecteur.

 

hebergeur image... côté marseillais, ai-je dit? Force est de constater que ce recueil de nouvelles est bien ancré dans un certain terroir, dans la mesure où il fait apparaître tour à tour le port de Marseille, la Promenade des Anglais et quelques autres lieux emblématiques d'un certain sud de la France. Cette impression est soulignée par le lexique: sur une écriture propre et soignée, viennent se greffer quelques mots, tours de langage et allusions typiques, colorés, dûment expliqués au besoin. Les lieux sont aussi indiqués, donnant à voir du pays, de manière très directe: le lecteur qui connaît les lieux se sentira vite chez lui.

 

Et puis il y a la nostalgie, qui imprègne la première nouvelle du recueil, "Rue des Cinq-Cents". L'auteur reconstruit ici l'autobiographie de son personnage, de la jeunesse où l'on regarde les filles à la dérobée jusqu'à l'extrême vieillesse où l'on bande encore. La nostalgie revêt des contours flous dans "La Montagne bleue": on ne saura jamais vraiment ce qui s'est passé entre Marie-Odile et son frère François, sauf à accepter une explication minimale à laquelle il faudra se résigner. Quant à "La vieille dame qui rêvait sur la plage", ne passe-t-elle pas son temps à réécrire sa propre vie afin de lui donner un peu de brillant? Cela, quitte à rappeler le temps où les nouveaux Russes ont débarqué en masse sur la Côte d'Azur, profitant de la chute du monde communiste.

 

Joli recueil donc, généreux et sensuel, friand et coloré, que "La vie en crue"! La nostalgie n'y est jamais lourde, mais adopte sans complexe un certain sens de l'hyperbole, qui fait sourire, en particulier dans "La vieille dame qui rêvait sur la plage", ou reste dans la demi-teinte, comme dans "La montagne bleue", nouvelle traversée d'une pointe d'amertume, d'impression de rendez-vous manqué. L'auteur de "La vie en crue", quant à lui, ne manque pas son rendez-vous avec son lectorat: de la vie, ses personnages en ont à revendre.

 

Jean-Claude Garrigues, La vie en crue, Louvain-la-Neuve, Quadrature, 2013.

 

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commentaires

L
Marseille, c'est en Provence, pas sur la Côte d'Azur... je te pardonne cette erreur géographique.<br /> Une maison d'éditions qui propose de jolis titres et à la politique d'envoi d'ouvrage commandé qui m'avait surprise ! (oui, en tant que française, payer après avoir reçu le livre me semble... bizarre....)
D
Argh! Je vais rectifier cela. <br /> Merci pour ce retour! La maison d'édition est spécialisée dans les nouvelles, ce qui est peu courant et sympathique! C'est quelque chose que j'apprécie chez eux.

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